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 Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]

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Sonny Malone

Sonny Malone
La Fille de vos Rêves… ou de vos Cauchemars





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MessageSujet: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeSam 28 Jan - 16:14

L’air était lourd en cette fin d’été. C'était le 13 septembre et le soleil cognait fort et provoquait sur tout le monde une sensation de langueur estivale. Sonny avait passé presque tout son après-midi assise à un bureau, dans une salle de cours ou à la bibliothèque, enfermée entre quatre murs, à regarder la vie qui grouillait à l’extérieur.

Quand elle quitta enfin la fac, elle décida de ne pas rentrer tout de suite. Son cerveau était trop plein, son corps ankylosé. Non, elle n’avait pas envie de s’enfermer à nouveau dans sa petite chambre, seule. Alors elle inspira profondément l’air et laissa la douce chaleur l’envelopper. Pour se changer les idées, elle décida d’aller au parc.

Et quelle bonne idée elle eut là. La vie palpitait ici. Les enfants s’ébrouaient joyeusement, les éclats de rire volaient de toutes parts, les amoureux se bécotaient sur les bancs publics comme le disait la chanson. Elle croisa une multitude de visages. Un couple visiblement tout frais, un groupe de femmes âgées rigolant comme des enfants, une magnifique femme blonde aux yeux verts. Un homme, le regard sombre mais d’un bleu puissant, châtain. Leurs yeux se croisèrent mais la française fit comme tout le monde dans ces cas là : elle regarda ailleurs. Réaction idiote, mais terriblement humaine. Enfin, tout cela la calmait. Elle se sentait bien. Mais elle était toujours fatiguée, alors elle repéra un coin d’herbe encore libre et s’y étendit, comme la plupart des promeneurs l’avaient fait avant elle.

Il y avait du monde, beaucoup de monde, mais cela n’était pas grave. Sonny sentait le chatouillement de l’herbe sur ses bras et la chaleur du soleil sur son visage… Les bruits environnants la berçaient comme un bébé. Et elle n’avait dormi que quelques heures ces dernières nuits, alors ce fut à peine si elle se sentit partir, partir, partir…

La française ne se rendit réellement compte qu’elle s’était endormie que lorsqu’une sensation bien connue s’imposa à elle. Un rêve… oui, un rêve qui n’était pas le sien commençait à s’imposer à elle, comme à l’époque où elle ne contrôlait pas sa capacité. Ça ne pouvait être qu’un rêve puissant…

Les images se firent de plus en plus précises dans sa tête, et de plus en plus violentes… Enfin, précises n’était pas le bon mot. Sonny ne distinguait que des bribes, sans queue ni tête. Un cauchemar… Pour rêver presque toutes les nuits de l’incendie du Domaine et de la mort de ses amis, elle les reconnaissait dès les premières secondes. Là, on aurait dit une pièce lugubre. Sans fenêtre. Une chaise, un homme ligoté assis dessus, en bien piteux état. Et du sang, des cris. Des hommes en tenues de soldats… Sonny sursauta et s’entendit crier quand elle reçut sur elle un flot de sang venant de la blessure qu’un individu infligeait à sa victime ligotée… Avait-elle su garder suffisamment de contrôle pour masquer sa présence ? Impossible à dire. Et cet homme, torturé, lui disait vaguement quelque chose.

Mais quelle horreur ! Qui pouvait rêver de ça, de tant de souffrance et de douleur ? Qui avait pu vivre ça ? Parce que c’était forcément du vécu, elle le sentait au plus profond d’elle-même. Tout allait trop vite, elle n’arrivait pas à se concentrer suffisamment pour identifier clairement le rêveur. Mais elle ne pouvait pas laisser cette personne dans cet état. Elle savait ce que cela faisait, ce genre de cauchemar, sur son propre équilibre et si quelqu'un avait le pouvoir de transformer ses rêves à elle, elle en serait ravie. Alors Sonny laissa libre cours à sa capacité. Elle fit disparaître un à un les soldats, elle éclaira la pièce en abattant les murs. Elle transforma le lieu clos en un parc verdoyant… Un peu naïf, certainement, comme paysage, mais au moins il n’était plus question de mort et de souffrance et puis généralement, les rêveurs projetaient leurs propres désirs ensuite, donc elle ne faisait qu’inviter le pauvre homme à changer son cauchemar, elle était juste là pour tendre la main, il ne tenait qu’à lui de la saisir et elle ne le lâcherait pas…
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Remington Pillsbury

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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeDim 29 Jan - 21:40

Un craquement. Celui-ci provenait-il de mes membres ou de la chaise sur laquelle j'étais assis. Je me sentais tellement las que je n'aurais su répondre à cette question. C'était peut être la chaise qui avait grincé car je venais de bouger ou mes membres qui avaient craqué car je venais également de m'étirer. J'avais l'impression que mon cerveau avait été réduit en compote durant les dernières vingt quatre heures. Depuis la veille au soir, je travaillais sur mes planches, esquissant des ébauches, les effaçant, recommençant, pour de nouveau effacer. J'avais les idées en tête mais je n'arrivais pas à les exprimer. Cela me frustrait et cette frustration était accrue à cause de la fatigue. Je n'avais dormi que trois heures au cours de la nuit. Mon cerveau était trop en ébullition pour que j'arrive à trouver le sommeil. Il fallait que j'avance mon projet sinon je ne trouverai pas le sommeil. Je devais m'avouer que je n'avais pas beaucoup avancé et que si je continuais ainsi, je n'avancerai pas davantage pour la journée qui était d'ailleurs bien avancée, chose que je pus constater en jetant un coup d'œil à ma montre. Il était grand temps de faire une pause et d'aller m'aérer l'esprit. Je pris rapidement une douche, changeant de vêtements au passage mais ne prenant pas la peine de me raser. A quoi bon, je n'avais rien de prévu. Aucun rendez-vous professionnel qu'il soit officiel ou officieux. C'était le calme plat.

Mes pas prirent la direction de Central Park. La journée était bien avancée mais nous étions encore en été. Pour ce lundi 13 septembre, la chaleur était bien présente mais elle était supportable. Ce n'était pas celle-ci qui allait me déranger après ce que j'avais vécu par le passé. Peut être que je n'aurais pas du choisir le parc, ce fut ma constatation après quelques minutes à déambuler dans les allées. Il y avait du monde, un début de semaine, un comble. En même temps, vu l'heure c'était un peu normal, les gens sortaient du boulot et avaient l'envie de décompresser un peu. Ils auraient seulement pu choisir un autre lieu. Moi également...

Quelque chose vint me percuter sur l'arrière de la tête. Par réflexe ma main se posa sur mon crâne, à l'endroit que l'objet avait touché. Je me retournais, déjà prêt à en découdre avec la personne qui avait osé me toucher. Mes prunelles bleues furent attirées par une forme ronde. Un ballon. Je m'avançais et le ramassais, cherchant du regard son propriétaire. Il ne tarda pas à se montrer. L'enfant devait avoir dans les sept ou huit ans. Il ouvrit la bouche, sans doute pour s'excuser, mais quand il croisa mon regard, aucun mot ne sortit. Je me contentais de lui tendre son ballon. Il déguerpit en courant, oubliant les excuses qu'il devait prononcer. Je savais que mon regard était parfois trop froid, bien malgré moi. Un simple coup d'œil et j'arrivais à intimider une personne si celle-ci était faible mentalement. Je ne savais pas trop à quoi c'était dû. Le bleu de mes prunelles ? L'expression qui traversait mon regard ? Je m'en fichais en fait et que je fasse cet effet me convenait parfaitement. Cela éloignait les gens susceptibles de venir me faire perdre mon temps – même si j'aimais bien parfois le perdre juste par plaisir.

Mon regard croisa des prunelles noisettes. Je m'attardais un peu sur la personne. Il fallait dire qu'elle n'était pas déplaisante à regarder. Je ne m'arrêtais pourtant pas et poursuivis ma route. Brusquement, je quittais le sentier du parc pour m'aventurer sur l'herbe. La fatigue était en train de prendre une place un peu plus importante dans mon esprit au fil des minutes. J'étais en train de me rendre compte que j'avais oublié de me nourrir depuis la veille, trop occupé à dessiner. Je devais m'asseoir un peu sinon j'allais tourner de l'œil. Je fis l'erreur de m'allonger plutôt que de m'asseoir. La sanction ne mit pas longtemps à tomber. Une journée quasiment sans dormir, oubliant de se nourrir, c'était suffisant pour que je m'endorme.

Je détestais dormir. Mes sommeils étaient agités et très souvent je faisais des cauchemars. Toujours les mêmes et en boucle. Cette sieste sur l'herbe ne dérogea pas à mes habitudes. Je partais irrémédiablement vers un nouveau cauchemar. Encore l'Irak... La pièce dans laquelle je me trouvais étais sombre. Il n'y avait pas de fenêtre, seulement une ampoule qui l'éclairait faiblement. J'étais ligoté à une chaise, les mains dans le dos et torse nu. Ma vision était brouillée, j'avais un œil qui avait complètement enflé si bien que je visualisais rien avec celui-ci. Je n'arrivais plus à l'ouvrir. Mon corps me faisait mal de toute part. J'avais sûrement des côtes cassées. La porte face à moi s'ouvrit. Je regardais dans la direction et distinguais une silhouette éclairée par la lumière venue du couloir. Je ne distinguais pas le visage de l'homme. Je ne comprenais même pas ce qu'il me disait. La langue m'était étrangère. La seule fois où il avait tenté de me parler en anglais, je lui avais ri au nez, me moquant de son accent. J'aurais du m'abstenir. La sanction avait été sévère. La douleur physique était bien présente mais elle commençait à se mettre en retrait par rapport à ma douleur mentale. Une colère et une haine se faisaient de plus en plus présentes, au fil de mes tortures. Des rires. La porte qui se refermait sur les hommes. Ils étaient avec moi dans ce qui me servait de cellule. Ca allait commencer. Je savais que celui à ma gauche allait sortir une matraque. Il adorait cet objet et me faisait y goûter depuis plusieurs jours déjà. Il fallait que je les arrête. Cette fois ça ne serait pas eux qui seraient gagnants. Hors de question.

Quelque chose vint perturber mon cauchemar. Il ne se déroulait pas comme toutes les autres fois. Le soldat à la matraque disparut brusquement. Celui qui se tenait à côté de lui également. Les murs prirent le même chemin. La lumière m'aveugla, je fermais mon œil valide. Je mis quelques secondes avant d'arriver à l'ouvrir. De la verdure tout autour. Mais comment ? Je me rendis compte que mon œil tuméfié ne l'était plus et que je voyais distinctement le paysage qui m'entourait. L'endroit me semblait si reposant, cela faisait si longtemps qu'un lieu ne m'avait inspiré un tel sentiment. Je me levais de la chaise sur laquelle je me trouvais. Mes liens avaient disparu. Les douleurs qui parcouraient mon corps également. Je ne comprenais rien, me demandant si je n'étais pas en train de faire un rêve à l'intérieur de mon cauchemar. Cette possibilité pouvait-elle seulement se réaliser ? N'y croyant pas vraiment, je secouais machinalement la tête à l'intérieur de mon rêve. Ce n'était qu'une question de secondes avant que mes souffrances reviennent ainsi que mes bourreaux. Je ne me faisais pas vraiment d'illusions. Rien ne me sauvait à chaque fois. J'étais toujours perdant. Et pour moi, cette modification de mon cauchemar n'était qu'une illusion qui ne tarderait pas à s'évanouir. Je m'asseyais dans l'herbe du parc. Et j'attendis.
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeMar 31 Jan - 19:30

Sonny s’essuya le visage. Cela avait beau n’être qu’un rêve, elle avait vraiment l’impression de sentir la texture et la chaleur du sang sur elle. Comment cet homme pouvait-il ne pas devenir fou, à ressasser continuellement ce cauchemar ? Elle-même commençait à disjoncter à force de voir encore et encore l’incendie, les morts, les larmes…

Elle était contente de pouvoir faire quelque chose pour lui. Même si cela n’était que pour quelques minutes. Un peu de répit, cela ne pouvait être que profitable. Et cela lui permit, à elle, de considérer un peu plus en détail le rêveur. Cela lui revenait maintenant ! Cet homme, c’était le promeneur qu’elle avait croisé un peu avant. L’homme aux yeux bleus. Sonny l’observa avec un peu plus d’attention cette fois. Il était grand, plutôt bel homme, la petite trentaine, certainement. Ses traits étaient fatigués, son regard perdu. Et pourtant, il dégageait un je-ne-sais-quoi de fort et de magnétique. Qu’avait-il donc pu vivre ? Comment était-il devenu lui ? Sonny se posait souvent ce genre de questions quand elle entrait comme ça dans les rêves des gens, mais cet homme était certainement celui qui l’intriguait le plus.

Et pour cause, il ne réagit absolument pas comme les autres avaient pu le faire avant lui.

La plupart des rêveurs ne se rendaient pas compte des changements qu’elle opérait parce qu’elle agissait au niveau de l’inconscient… ou du subconscient… raah, pourquoi n’avait-elle pas suivi de cours de psycho ? Aussi, certains pouvaient être légèrement décontenancés, mais le cerveau est une machine merveilleuse, qui cherche à tout prix à rabattre l’inconnu sur du connu. Le paysage qu’elle créait ne disait rien au rêveur ? Qu’importe, puisque son cerveau corrigeait de lui-même cette erreur en y projetant le souvenir d’un endroit qu’il avait déjà visité.

Parfois, Sonny leur parlait, à ses hôtes nocturnes. Là encore, la plupart des rêveurs, instinctivement et inconsciemment, substituaient sa voix à celle de proches. Toutes ces considérations traversèrent l’esprit de Sonny, car elle se demandait vraiment quoi faire pour cet homme.

Elle aurait vraiment cru que cette « libération » le soulagerait. D’ailleurs, elle-même avait passé des heures, la veille, enfermée dans un ascenseur, sans aucune ouverture sur l’extérieur, et elle s’était sentie terriblement soulagée quand les portes s’étaient enfin rouvertes. Et encore, elle n’avait pas été torturée par Anton comme cet homme l’était par ses bourreaux. Alors comment expliquer cette réaction ?

Au lieu de savourer sa libération, il s’était assis dans l’herbe, acceptant tel quel le paysage, comme s’il n’y croyais pas. Vraiment très étrange… Etait-ce Sonny qui perdait le contrôle sur sa capacité, ou était-il réellement différent ? Impossible de rester sans réponse. Alors elle s’approcha, lentement et avec précaution. Il fallait qu’elle agisse, s’il se réveillait, elle ne pourrait rien. Il fallait donc qu’elle se décide, tout en s’efforçant de masquer sa présence. Puis elle prit place à côté de lui. Pour avoir elle-même des cicatrices, elle devinait qu’il en portait de profondes. Pas dans sa chair, mais dans son âme, de celles qui sont les plus lentes à guérir. Mais il semblait étonnamment serein. Presque résolu. Comme s’il avait appris à vivre avec. Avec ses douleurs et ses cauchemars, ce qui intrigua la jeune fille encore plus.

Que faire ? Elle n’allait quand même pas changer une nouvelle fois de paysage… peut-être que si elle lui parlait, il entendrait la voix de quelqu’un qui comptait pour lui et l’écouterait… Mais elle-même était fatiguée. Elle n’avait presque pas dormi la nuit dernière et recourir à son « don » l’épuisait. Elle ne savait pas du tout si elle parviendrait à masquer sa présence ou si elle finirait par devenir visible… Bon, dans le pire des cas, cela ferait un choc au rêveur, il se réveillerait et on n’en parlerait plus. Ou peut-être que son inconscient accepterait l’idée d’une inconnue surgissant de nulle part… Dans les deux cas, de toute façon, qui était réellement capable de se souvenir clairement de ses rêves ? A son réveil, Sonny ne serait plus qu’un vague souvenir, un point aveugle, une impression, du moins, c’était ce qui s’était toujours passé. Advienne que pourra, elle ne pouvait pas le laisser dans cet état, alors elle ferait ce qu’elle pouvait pour rester invisible, mais elle était prête à courir le risque. Complexe du sauveur ? Peut-être…

« C’est terminé, lui dit-elle enfin. Pour cette fois, c’est terminé. C’est vraiment tout ce que vous avez envie de faire ? Rester assis-là, tout seul ? Vous êtes libre, profitez-en. »

Sonny n’était pas satisfaite de ce qu’elle avait dit. Pour avoir vécu l’enfer, elle savait que les mots étaient bien loin de pouvoir panser les blessures. Et certaines d’entre elles ne pouvaient pas être soignées par quelqu’un d’autre. Elle ne voulait pas le brusquer, ni tenter sur lui une psychologie de bazar. Elle avait trop de respect pour la souffrance des hommes. Elle voulait juste « l’inviter », pour que l’impulsion vienne de lui. Elle sentait ses forces s’amenuiser et se demandait vraiment si cela le choquerait vraiment qu’elle apparaisse soudainement à ses côtés…
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeDim 5 Fév - 11:55

M'asseoir et attendre, ce furent les deux choses que je décidais de faire quand mon cauchemar dévia de sa projection habituelle. J'étais perturbé car c'était la première fois qu'il ne suivait pas son cours. J'aurais pu me sentir soulagé qu'il ne se termine pas comme les autres fois. Pourtant je n'osais y croire. Peut être que quelque chose en moi bloquait et refusait de voir la réalité. Du moins ce qu'on pouvait considérer de réel dans un rêve, autrement dit, rien. Je m'attendais à ce que ce paysage reposant autour de moi s'évanouisse aussi rapidement qu'il était apparu. Que les bourreaux reviendraient, matraque en mains, me faire subir les pires tortures qui me laisseraient de nouvelles cicatrices. Mes doigts se posèrent sur ma hanche droite. Je m'attendais à sentir la grande balafre qui la taillait mais elle n'était pas là. En plus de faire disparaître ce cauchemar, mes blessures étaient pansées ? C'était trop beau pour être, je sentais que j'allais finir par me réveiller pour constater que ce n'était qu'une illusion qui m'aurait soulagé l'espace de quelques minutes.

Je pliais mes jambes pour venir caler mes genoux contre mon menton. Je me repliais sur moi-même, gardant un oeil sur le paysage qui m'entourait. Il me semblait familier mais je n'arrivais pas à mettre un nom ou un lieu sur celui-ci. Le Montana ? Je l'avais quitté à l'âge de quatre ans, il m'était impossible de me souvenir des paysages qui le composaient. A moins que ça soit enfoui quelque part au fond de moi et que ça décidait de ressortir brusquement. Mais pourquoi maintenant, pourquoi ce paysage ? Je crus sentir une présence à mes côtés. Je tournais la tête mais il n'y avait rien. Seulement de la verdure et moi. J'aurais du me calmer et pourtant j'étais aux aguets, à moitié sur les nerfs. Quelque chose venait interférer avec mon cauchemar. Je n'en avais pas complètement conscience mais suffisamment pour que cela me perturbe. C'était pire que ce dont j'avais l'habitude de rêver. Car justement, ça me sortait de mes habitudes et m'amenait sur une pente inconnue, que je ne pouvais contrôler et dont je ne savais pas comment elle se terminait à son extrémité, quand j'aurais fini de la dévaler.

Une voix me murmura que c'était terminé. Quoi donc ? Elle me semblait familière et pourtant je n'arrivais pas à la reconnaître. S'agissait-il de ma petite soeur Jayden ? Je le crus avant de rayer cette option. J'avais laissé derrière moi une enfant qui était à présent une jeune femme dont la voix avait changé. Ma mère adoptive ? Non plus, cela faisait si longtemps que j'avais rompu tout contact avec les Blackwell. Je ne ressentais même pas le besoin de renouer avec eux. Pour rien au monde, car je n'avais rien à leur apporter si ce n'était de la souffrance. A qui pouvait appartenir donc cette voix, je n'arrivais point à le déterminer, et je ne cherchais plus à le savoir. Cela n'aurait fait que torturer mon esprit qui l'était déjà suffisamment. Je me concentrais donc sur les propos de la voix qui me disait que c'était terminé pour cette fois là. Si seulement elle avait raison, si seulement je pouvais m'accrocher à elle et être tenté de la croire.

« Ce n'est pas terminé... Ce n'est qu'un éternel recommencement... »

Je ne pouvais la croire. Je ne savais même pas pourquoi je parlais dans mon rêve. Est-ce que c'était vraiment moi d'ailleurs qui venait de prendre la parole ? Voilà que je me mettais à me parler à moi-même. Si jamais je me réveillais, je rigolerai de mon comportement, si tenté que je m'en souvienne. La voix me disait que j'étais libre, je n'avais pas ce sentiment au fond de moi. La liberté, c'était quoi exactement. Se sentir heureux ? Croquer la vie à pleine dents, en profiter et sourire de ses petits riens ? Si c'était ça, j'étais loin de la liberté et peut être même que je ne l'attendrai jamais. Avoir le sentiment d'être libre ou heureux, je voulais bien accorder que ceci existe, mais avoir toute la plénitude de la liberté, c'était quelque chose qui me semblait abstrait. Et ce rêve était tout aussi abstrait.

« Qui êtes-vous ? C'est une nouvelle méthode de torture que l'on expérimente pour me rendre dingue. »

J'optais pour cette option à défaut de toutes les autres positives qui s'ouvraient à moi. A choisir entre le pessimisme et l'optimisme, je prenais toujours le premier choix en ce qui me concernait personnellement. Cela évitait les déceptions et surtout les illusions. La vie était ainsi faite. Certains avaient droit au bonheur. D'autres l'espéraient en le cherchant. Moi, je n'attendais rien, je me contentais de vivre sans espoir, sans illusion, continuant à avancer avec les démons du passé qui me taraudaient et se rappelaient à mon bon souvenir si j'avais le malheur de croire l'espace de quelques secondes qu'ils pouvaient me laisser en paix.
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeLun 6 Fév - 18:09

Elle était vraiment à côté de la plaque. Elle n’y arrivait pas. Cet homme était en train de se noyer dans ses souvenirs, dans son passé, et elle n’arrivait pas l’aider. Qu’espérait-elle en réalité ? De quoi se mêlait-elle ? De quel droit changeait-elle ses rêves ? Aucune idée, mais elle ne parvenait pas à lâcher prise. Et il ne semblait y avoir personne dans son passé qui puisse le sauver. Il ne paraissait vouloir écouter personne, alors que pouvait-elle faire, elle qui n’était rien de plus qu’une inconnue intrusive ?

Les propos qu’il tint ne firent qu’accentuer son sentiment d’impuissance. Une torture ? Un éternel recommencement ? Etait-ce vraiment ce qu’elle faisait sans s’en rendre compte ? Elle le torturait. Elle mourrait d’envie de lui dire que non, qu’elle ne faisait cela que parce qu’elle savait ce que souffrir voulait dire. Un éternel recommencement… oui, toutes les nuits le Domaine brûlait, toutes les nuits ses amis perdaient la vie en essayant de la sauver.

Elle ne pouvait pas aider les gens contre leur gré, il fallait qu’elle se fasse une raison. Et il semblait de plus en plus évident qu’elle ne parviendrait pas à le sauver, en dépit des efforts qu’elle avait fournis. Elle ne le connaissait pas, elle ne savait rien de lui. Elle n’avait aucun moyen de savoir ce dont il avait réellement besoin.

« Je suis désolée. Je ne suis pas là pour vous faire du mal, ce n’était pas mon intention, lui dit-elle en abandonnant toute prudence. Je voulais… je ne sais pas ce que je voulais. Je pensais pouvoir vous aider, je me suis trompée. Avec un peu de chance, vous vous réveillerez un peu plus reposé. S’il y a quelque chose que je peux faire pour vous, je le ferai. Si vous ne voulez pas… Je suis désolée, je ne vous ennuierai plus. »

« S’il y a quelque chose que je peux faire pour vous, je le ferai »… encore une demi-vérité, songea-t-elle. Bien sûr que c’était son intention, mais s’il lui demandait une image de son village natale ? Elle ne connaissait pas les Etats-Unis, alors elle n’arriverait pas à construire une image valable. Pareil, s’il voulait revoir quelqu’un de sa famille, elle ne pourrait pas satisfaire sa demande. Non, elle était inutile et elle n’avait rien à faire dans ce rêve…

Elle avait oublié toutes les mesures de précautions nécessaires, tout ce que Anne et Liam lui avais jadis enseigné pour qu’elle fasse un usage mesuré et sécurisé de sa capacité. Ne pas l’employer en état de fatigue intense, limiter l’usage de la parole, ne pas entrer en contact « physique », ne pas se rendre visible. Et voilà qu’en quelques secondes, tous ces beaux conseils finirent à la corbeille. Car sans que cela soit involontaire, pour se relever, elle posa la main sur l’avant-bras de cet inconnu, s’appuya et se hissa sur ses jambes.

Pour elle, ce contact fut plutôt agréable, sans une once d’agressivité, mais elle ne savait pas comment il réagirait, ni même s’il l’avait sentie. La plupart du temps, elle n’était qu’un fantôme que personne ne voyait. La femme invisible, depuis qu’elle avait appris à se contrôler. Alors il y avait peu de risque pour que cela change. Mais cet homme était différent et les circonstances aussi.

Une fois qu’elle fut debout, elle pivota pour s’éloigner et sentit qu’elle redevenait visible. S’il ne se retournait pas, il ne la verrait pas et tout continuerait comme avant. Il reprendrait sa vie et ses cauchemars et elle aussi. Chacun irait de son côté, tous deux resteraient murés dans leur souffrance respective. Mais s’il la voyait… personne ne pouvait prévoir ce qui se passerait. Elle devait avoir le courage de quitter le rêve, d’admettre son échec, de le laisser. Mais elle n’y arrivait pas et en dépit du bon sens, elle se tourna une dernière fois, en sachant pertinemment les risques, pour le regarder encore une fois…
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeMar 7 Fév - 16:47

C'était plus fort que moi. Entre la perspective d'avoir un rêve qui me changeait de l'ordinaire, me sortirait de mon quotidien en m'offrant une douceur que je ne connaissais plus depuis bien longtemps, et la négation, j'avais choisi de laisser libre court à mon côté paranoïaque, demandant à la voix, et surtout à moi-même, si j'avais droit à une nouvelle forme de torture. On ne me lâcherait donc jamais. Après avoir perdu mes parents très tôt, après l'horreur de la guerre et des tortures que j'avais subi, après la révélation de ma véritable nature, voilà qu'on venait me rajouter une couche. La puissance qui intervenait dans mon rêve se rendait-elle compte que je supportais beaucoup depuis longtemps et que j'étais une véritable machine à retardement ? Je supposais que non, qu'elle ne savait pas ce qui se cachait derrière mon calme et mon allure presque normale. Elle ne devait pas le savoir sinon elle aurait renoncé et serait partie en courant. Ou alors, elle savait comment me canaliser, voilà pourquoi elle prenait de tels risques. J'esquissais un sourire à cette possibilité, ne croyant pas vraiment qu'une personne soit capable de me comprendre et de me canaliser. Je lui laissais quand même le bénéfice du doute et écoutais la suite de ses paroles.

L'ombre de mon sourire disparut. J'avais laissé un espoir à une chose qui n'arriverait pas apparemment. La voix que j'entendais était désolée et s'excusait. Cela voulait dire qu'elle était entrée dans mon rêve sans savoir ce qui l'attendait. Dans mon optique, je supposais qu'elle était folle d'agir ainsi. Son grain de folie lui avait fait oublier la prudence. La voix semblait capable de pénétrer dans les rêves mais n'arrivait pas à contrôler le mien. Étais-je si fort mentalement ou était-ce une simple coïncidence ? Je pensais à l'inconscience. Surtout de me proposer de faire quelque chose pour moi si je le demandais. Complètement inconsciente et folle. Cela eut pour effet de me détendre. Je ne me sentais pas en danger avec cette voix même si je ne voyais pas la personne. Je levais peut être trop tôt ma garde mais que pourrait-elle me faire ? Me torturer, je l'avais déjà été et je revivais les scènes à chaque fois que j'arrivais à m'assoupir. M'endormir l'esprit pour tenter de me contrôler ? Elle pouvait tenter mais si elle se ratait, j'espérais pour elle que le corps qui accompagnait la voix que j'entendais savait courir très vite. Du moins plus vite que moi.

Je fus sur le point de sortir une bêtise dont j'en avais le secret. Mais quelque chose sur mon bras m'arrêta. Je le regardais mais ne vit rien. J'avais juste senti. Comme une présence. Se pouvait-il que la voix soit un fantôme ? Je n'y croyais pas à ces choses là. Trop surnaturel pour moi. J'admettais certes l'idée que j'avais un don qui me faisait me transformer en animal, je savais qu'il existait des personnes ayant également des dons – d'ailleurs cette voix devait en faire partie – mais admettre l'existence de fantômes, de parler aux revenants, ou croire aux petits hommes verts, non merci. L'homme avait déjà assez à faire avec ses propres démons intérieurs pour se rajouter une couche de soucis. Pourtant cela semblait plaire à certains, de croire à autre chose pour se sortir de leur petit train train quotidien. Il fallait bien se raccrocher à quelque chose pour donner un sens à son existence n'est-ce pas...

Je dépliais mes jambes, prenant appui sur mes mains et me relevais. Je regardais autour de moi et je la vis. Elle me tournait le dos. Au début je crus que mes yeux me jouaient des tours. Il m'avait semblé la voir puis elle avait disparu. Je clignais les paupières pour m'assurer que je ne rêvais pas – ce qui serait un peu paradoxal vu que je rêvais déjà.... Non, je n'avais pas des hallucinations. Elle semblait bien réelle et s'en allait. Hors de question à présent que je distinguais sa silhouette de la laisser partir. Je me précipitais derrière elle. Une fois parvenu à sa hauteur, je posais une main sur son épaule, la forçant à s'arrêter et à se retourner. Je plissais un peu les yeux. Le visage me semblait familier pourtant j'étais bien incapable de mettre un nom sur ce visage féminin. Aussi agréable qu'il soit à contempler. C'est alors que ça me revint. C'était la jeune femme que j'avais croisé sur le sentier du parc et dont j'avais trouvé les courbes intéressantes. Je me demandais si elle m'avait suivi et avait attendu que je m'endorme pour entrer dans mon rêve. Aussitôt je me dis comment aurait-elle pu savoir que j'allais m'assoupir ?

« Vous êtes vraiment dans mon rêve ? »

Et voilà que je faisais mon nigaud en posant une question idiote. Bien évidemment qu'elle était dans mon rêve. Je supposais que c'était elle qui en avait fait dévier le cours pour me le rendre agréable. Que c'était elle qui ferait quelque chose pour moi si je le lui demandais. C'était une proposition vague qui donnait une ouverture sur un nombre incalculable de possibilité. Ma main était toujours posé sur son épaule. Je ne la retenais pourtant pas prisonnière, il lui suffisait d'un mouvement pour se dégager. Je tentais de comprendre son truc mais n'y arrivais pas. Je n'étais de toute façon pas bien certain d'être éveillé dans mon propre rêve. Peut être que si je tentais de faire quelque chose, cela me prouverait que j'étais bien dans mon rêve et non dans la réalité. Ce que je fis. Idée stupide mais guidée par mes sens. Je couvris ce qui restait de distance entre la jeune femme et moi et me penchais pour poser mes lèvres sur les siennes. Un baiser doux mais je ne sentis pas le goût de ses lèvres ce que je trouvais regrettable. Fichu rêve. Au bout de quelques secondes – je serais bien incapable de dire si le temps est raccourci ou rallongé dans un rêve, cela doit dépendre du plaisir qu'on a à le faire – je m'écartais.

« Vous avez dit que vous feriez quelque chose pour moi si vous le pouviez. J'aurais bien proposé qu'on fasse l'amour mais dans un rêve, ça risque de paraître un peu bizarre... »

Il avait fallu que je la sorte... Mais c'était plus fort que moi. Cette femme m'avait tendu une perche énorme et avait fait preuve d'une grande imprudence. S'en rendait-elle à présent compte ? Je ne savais même pas ce qui me prenait de penser ainsi, après tout je ne la connaissais pas et je pouvais profiter de la situation. Et pourtant...

« C'est risqué ce que vous faites.. Même si ce n'est qu'un rêve, imaginez que je sois un tueur psychopathe, et que je sois capable de vous faire un retour de manivelle car vous avez manqué de prudence en vous immisçant ainsi dans mon intimité... »
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeMer 8 Fév - 18:23

Elle l’avait sentie… cette main, grande, puissante sans être violente. Son cœur sembla s’arrêter de battre. Jamais quelqu’un ne l’avait touchée dans un rêve. On l’avait déjà vue, ça oui. A l’époque où elle ne contrôlait pas sa capacité, elle apparaissait à tout va dans les rêves de ses camarades au lycée, provoquant beaucoup de cauchemars en eux… au point qu’un jour, ils l’avaient passée à tabac. Mais jamais personne ne l’avait sentie et touchée.

Ses yeux bleus, durs et froids comme l’acier, étaient rivés dans les siens. Sonny était totalement incapable de bouger, paralysée par la surprise. Elle s’était bien doutée que les choses cette fois seraient différentes, mais pas à ce point là. Elle n’avait vraiment pas géré la situation, vraiment, vraiment pas. Elle s’était crue capable de maîtriser ce cauchemar, capable de panser les souffrances d’un homme visiblement plus expérimenté qu’elle et qui avait vécu l’horreur.

Elle était si troublée qu’elle l’entendit à peine lui poser une question. Non, vraiment, son cerveau était trop embrouillé et de toute façon, il n’attendit pas de réponse. Sans crier gare, comme ça, l’homme se pencha et lui déposa un baiser sur ses lèvres. Elle aurait pu se dégager de son étreinte car il ne la menaçait pas et ne la retenait pas, mais c’était si… inattendu. Ce n’était qu’un rêve, alors la sensation était plus qu’étrange. Un effleurement, juste un effleurement. Ainsi que le picotement de sa barbe de trois jours. Pourtant, Sonny se souvint à ce contact de ce que cela faisait d’être embrassée : une vague de chaleur dans tout le corps, les chatouillements dans le bas du ventre, les jambes flageolantes…

Mais ce baiser comme toute chose eut une fin, et Sonny retomba vite dans la réalité… si tant est que l’on puisse dans le cas présent parler de réalité. Après ce bref instant, l’inconnu redevint un homme des plus communs… un de ceux qui pensaient au sexe. Longtemps, Sonny avait eu des relations difficiles avec le sexe opposé. Rien de plus compréhensible : dès qu’un garçon l’intéressait, elle voyait dans ses rêves ce que lui rêvait de lui faire. Et se voir, comme ça, dans des positions, disons… indécentes l’avaient longtemps freinée et gênée dans ses histoires. Et là, voilà qu’il lui proposait de coucher là, comme ça… Rien que cette remarque lui donna envie de le gifler. Mais en même temps, il venait de lui donner une sacrée leçon. Ne jamais proposer une aide inconditionnelle et à l’aveugle. Et elle-même n’était plus une petite fille, elle avait grandi, elle avait appris deux trois choses sur les hommes, le temps du lycée était loin.

Toutefois, son petit speech n’arrangea rien. Il lui parlait comme à une enfant, la sermonnant presque de son inconscience. Oui, elle devait être folle de rentrer comme ça, dans la tête des gens. Quoique, pour être parfaitement exact, ce cauchemar s’était complètement imposé à elle. Alors ça n’était pas totalement de sa faute. Mais voilà… il l’avait embrassée comme une femme et il la traitait désormais comme une enfant. Un tueur psychopathe ? Elle avait lancé la même blague à Anton moins de vingt-quatre heures plus tôt alors franchement, ce n’était pas ça qui allait l’effrayer. Il espérait vraiment qu’elle goberait ça et que ça suffirait à lui faire peur ? Ridicule…

Mais elle aussi était ridicule. Elle ne le connaissait pas et n’arrivait pas à se détacher de lui. Il fallait qu’elle réagisse, ce n’était pas son genre de se laisser embrasser comme ça par un inconnu, surtout un inconnu qui lui débitait des sornettes pour l’effrayer. Oh, elle n’était pas fâchée, mais s’il voulait jouer, tant pis pour lui…

Tout en gardant ses yeux rivés dans les siens, pour lui faire bien comprendre qu’elle ne le craignait pas, elle lui adressa un petit sourire en coin… avant de disparaître. Oui, il avait beau avoir posé ses mains sur elle un peu avant, ici, c’était elle qui était aux commandes, c’était elle qui décidait de la tournure des événements. Ici elle maîtrisait tout, et elle réapparut quelques pas derrière lui, sans se défaire de son sourire.

« Un tueur psychopathe ? Vraiment ? Ici c’est vous qui êtes à ma merci, ne l’oubliez pas. Et quant à coucher avec vous, je ne crois pas que ce soit une bonne idée…vous avez l’air de quelqu’un qui n’a pas dormi depuis des jours et je ne sais pas si vous seriez à la hauteur…»
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeJeu 9 Fév - 20:04

Les rêves amenaient à prendre des routes que l'on ne prendrait jamais de nous-même. La preuve avec les propos que je sortais et dont je n'étais pas certain que j'aurais pris la peine de les penser si j'avais été éveillé. Enfin si, l'idée de faire l'amour avec cette jeune femme me semblait agréable, mais éveillé, je ne lui aurais jamais proposé une telle chose. Du moins pas si tôt et pas sous cette forme... J'avais bien des défauts mais le terme obsédé par le sexe ne me qualifiait pas vraiment. Certes, j'avais des envies et des pulsions comme tout le monde. Mais je n'étais pas non plus un pervers obsédé qui ne pensait qu'à ça à chaque fois qu'il croisait une femme dans la rue. Je n'avais rien fait de mal de toute façon, j'étais dans mon rêve après tout. Et puis pourquoi je tentais de me justifier une chose à moi-même, cela en devenait absurde.

Autant partir sur la piste du tueur psychopathe pour la mettre en garde. Je ne savais même pas pourquoi je disais la vérité. Peut-être parce qu'elle ne croirait jamais que j'étais réellement un tueur. Certes, je tuais. Mais je n'appartenais pas au profil des tueurs en série qui agissaient selon un profil et une ligne de conduite à suivre. Je me fichais que ma cible soit un homme ou une femme. Qu'elle soit blonde, rousse ou brune. Riche ou pauvre. On me donnait un contrat je l'exécutais. La seule chose qui me démarquait, c'était ma signature qui devait poser peut être un problème aux membres de la criminelle pour comprendre la logique de mes actes. Aucun lien entre mes victimes. Seulement un nom à exécuter. Aucune logique donc et les profilers devaient s'amuser à tenter de me cerner. Je ne me croyais pas infaillible, loin de là. Je savais qu'un jour ou l'autre, il y aurait bien une personne pour mettre la main sur moi. Le jour où ça arriverait, est-ce que les membres de Agency viendraient à mon secours ? Je ne l'imaginais pas du tout. Nous étions tous individualistes dans cette organisation, se contentant d'agir car la rémunération était bonne.

Payer pour tuer. Payer pour faire naître la peur chez certains. Ce qui n'était pas le cas de la jeune femme qui se trouvait en face de moi dans mon rêve. Ses yeux ne se détournaient pas des miens. Si elle comptait sur moi pour détourner le regard le premier, cela pourrait durer des heures. Je n'étais pas facilement impressionnable. Elle me sourit brièvement et disparut. Bon ok, elle venait de m'impressionner car je ne m'attendais pas du tout à ça de sa part. Une réaction vive, une gifle, des cris pourquoi pas. Mais qu'elle disparaisse ainsi sous mes yeux, certainement pas. Elle était capable de faire ceci dans mon propre rêve, je me disais que son pouvoir était grand et me demandais quelles en étaient les limites. Le mien à côté me paraissait si insignifiant et il comportait tellement de contraintes... Je ne pouvais pas compter sur lui, seulement sur moi-même.

Je pivotais et la cherchais du regard. Elle n'allait tout de même pas s'amuser et jouer à cache cache tout le temps qu'il restait du rêve. Je n'espérais pas, car il ne me resterait en solution que de me réveiller. Jouer à ce jeu avec une jeune femme qui se comportait en gamine, ce n'était pas pour moi. Surtout que je ne menais pas ce jeu et que les règles m'échappaient complètement. Tout comme le cours de mon cauchemar qui prenait jusque présent une allure inattendue. Ce n'était pas pour me déplaire, j'aimais qu'on me surprenne. Je n'aimais simplement pas perdre le contrôle.

La voix me fit me retourner. Elle était réapparue derrière moi à quelques mètres. Elle me souriait toujours et je ne pus m'empêcher de sourire à mon tour. J'étais à sa merci selon ses dires. Dans ce cas là, pourquoi s'était-elle sentie obliger de réapparaître en gardant une certaine distance entre elle et moi ? Si elle menait la danse, elle aurait pu se rapprocher sans aucune crainte. Tandis que là, la petite distance qu'elle mettait entre nous me laissait penser qu'elle ne maîtrisait pas autant la situation qu'elle le clamait. Mon sourire ne disparut pas alors que j'écoutais la suite de ses propos. Elle avait du répondant. J'aimais ça, qu'on me tienne tête. Cela m'évitait de m'ennuyer dans des discussions qui duraient une éternité et qui étaient pompeuses. Je les supportais mais je signifiais clairement à mon interlocuteur que je n'étais pas loin de m'endormir s'il continuait à me barber avec ses propos.

« Je suis à votre merci et puis ? Vous allez me torturer ? De ce que vous avez vu de mon cauchemar avant que vous veniez le perturber, vous devez savoir que j'ai du vivre pire que ce vous pouvez me faire. Me tuer ? Je n'ai pas peur de mourir non plus. Reste à savoir si vous êtes capable de donner la mort à quelqu'un. »

Peut-être qu'elle cachait bien son jeu mais à l'heure actuelle, je la sentais inoffensive pour ma personne. Je ne craignais ni sa torture ni la mort qu'elle pouvait me donner. Si elle me tuait, au moins ça en serait fini de ce cauchemar incessant qui revenait sans cesse. A moins bien sûr qu'il ne me suive jusqu'aux enfers. Oui, car le paradis m'était fermé depuis bien longtemps. J'avais commis bien trop de choses négatives pour qu'on se penche une seule seconde sur mon dossier dans l'au-delà. Encore fallait-il que je crois au paradis et à l'enfer ce qui n'était pas le cas. Quand on mourrait, au mieux on était incinéré. Au pire, on nous mettait en terre et on finissait manger par des vers.

J'aurais pu couvrir la distance qui nous séparait pour tenter de la mettre mal à l'aise. Pour lui signifier clairement que je n'avais pas peur d'être à sa merci et qu'elle pouvait faire ce qu'elle voulait sans que cela ne m'atteigne. Je ne le fis pas, me contentant de garder cette distance qu'elle avait mis entre elle et moi. A la place, je me contentais de la fixer de mon regard bleu lagon. Elle avait repoussé l'idée en la trouvant mauvaise qu'on puisse coucher ensemble. Pourtant cela aurait pu être un moment agréable. Si elle l'avait voulu... Mais je ne la forcerai pas. Tant pis, j'oubliais cette option même si elle avait remis en cause mes performances. C'était facile de dire de telles choses en se basant sur mon apparence, sur ma tête qui faisait peur car je dormais peu depuis bien trop longtemps. Il fallait tester pour affirmer que je ne serais pas à la hauteur. J'aurais pu lui sortir cette réplique mais je m'abstins. Cela aurait paru vraiment obsédé de ma part. Et cette jeune femme m'intriguait. Bon elle m'attirait également, j'avais un goût d'inachevé avec ce baiser sans aucune saveur mais l'intrigue prenait le dessus sur le reste.

« Quand je me réveillerai, je me souviendrai de tout ceci ? Pour savoir si je dois vous mettre en garde de courir vite ou non. Car me clamer que je suis à votre merci je veux bien, mais si vous ratez votre coup, une fois éveillé, je ne vous raterai pas. Enfin si je me souviens de tout ça et du baiser.. »

Je haussais les épaules. En fait, je me fichais de lui courir après. Jusque présent je n'avais aucune raison de me venger d'elle. Ma seule motivation une fois éveillé était à la limite de savoir quel goût avaient réellement ses lèvres et si elles étaient aussi douces qu'elles m'avaient semblé l'être. Et également si le courage qu'elle faisait preuve ici serait le même dans la réalité...
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeVen 10 Fév - 21:00

Il ne baisserait pas les yeux, il n’était pas ce genre d’homme. Mais Sonny n’était pas là pour se battre avec lui. Elle n’était pas du genre vindicative ou agressive et si elle s’était mêlée du cauchemar de cet homme, ça n’était certainement pas pour aggraver la situation. Cet homme l’intriguait. C’était possible ça ? D’être à ce point fascinée par quelqu’un dont on ne sait rien ? Ou était-ce juste de la folie furieuse ?

Bizarre. Dans la vie réelle, elle n’aurait pas été aussi intrépide. Elle n’aurait pas été aussi « provoquante », elle n’aurait pas joué avec lui comme elle l’avait fait. Parce que dans la vie réelle, tout acte a des conséquences, parce que dans la vie réelle, Sonny était une fille responsable. Elle ne savait pas vraiment si c’était le fait d’être sur son territoire qui la rendait si hardie, ou si c’était juste la présence de cet homme qui lui faisait cet effet. Elle se surprit même à se demander si coucher avec lui ici, dans le rêve, « compterait »… Pas de conséquence, pas de danger, il suffirait juste d’éviter de le croiser dans la vraie vie. Grand huit des émotions, absence totale de logique… elle était passée de outrée à troublée en un rien de temps. Pourquoi s’attachait-elle à lui comme ça ? Parce qu’il était comme elle une âme blessée ? Parce qu’il était marqué dans sa chair comme elle portait sur le haut de son bras gauche une fine et longue cicatrice héritée des flammes de l’incendie ? Mauvaises raisons que toutes celles-là…

Mais visiblement, ni son humour ni ses intentions ne passaient bien. Il ne releva même pas sa pique… n’importe quel homme dont la virilité se trouvait mise en cause aurait réagi. Mais pas lui. Sonny en fut presque déçue, elle ne pourrait pas esquiver ses questions, il refusait tout détournement de la conversation. Voilà qu’il lui reprochait son intrusion et qu’il la soupçonnait de lui vouloir du mal. Or c’était bien la dernière chose qu’elle souhaitait. Et sa réplique était tout ce qu’il y a de plus déroutante. « Reste à savoir si vous êtes capable de donner la mort à quelqu'un ». Quoi ? elle ? tuer quelqu’un ? Déjà qu’elle refusait de mettre des tapettes à souris chez elle, alors donner la mort à quelqu’un, c’était juste impensable… Ou alors si, elle se savait capable de tuer une personne, celle qui avait détruit le Domaine. Oh oui, bien qu’elle ne fût jamais jusqu’alors revancharde, elle avait la haine au cœur, et cette haine la gangrénait. Si elle se retrouvait en face de l’incendiaire, elle n’hésiterait pas, au nom de sa famille, de ses amis, au nom de sa vie volée. Et en y repensant de plus près, elle avait déjà tué des gens. Dans leurs rêves, pour les réveiller. Car le cerveau bloque toute représentation de sa propre mort, il ne peut la concevoir, alors généralement, au moment de mourir, le dormeur se réveillait. Et Sonny avait déjà eu recours à ce stratagème, aussi amoral soit-il. Alors oui, dans un sens si cet homme avait réellement constitué une menace pour elle, elle aurait pu le tuer, pour l’obliger à se réveiller. Mais elle n’en avait pas l’intention et d’ailleurs, il se braquerait et quelque chose dans son regard lui fit comprendre qu’il avait effectivement les moyens de le lui faire payer. Mais pourquoi pensait-il à cela ? Avait-elle vraiment la tête d’une meurtrière ? Un peu vexant en fait…

Puis pour la deuxième fois en quelques minutes, il la menaça. Mais cette fois la menace était quelque peu atténuée par la condition « si je me souviens de ça et du baiser »… Oui, Sonny courait plutôt vite, mais est-ce que cela serait nécessaire ? Est-ce qu’il se souviendrait d’elle ou allait-il l’oublier ? Sonny n’en savait rien. Et elle n’avait aucun moyen de le savoir, cela dépendait totalement du rêveur. Certaines personnes ne se souvenaient jamais de leurs rêves, d’autres au contraire en gardaient un souvenir très clair. Oups… elle n’avait pas pensé à ça. Comment réagirait-elle si demain elle le croisait dans la vie réelle ? S’il se souvenait d’elle ? Est-ce qu’elle serait capable de lui tenir tête comme elle le faisait ? Est-ce qu’elle serait seulement capable de soutenir son regard ? Non, la réelle question, et elle le savait, c’était est-ce qu’elle lui résisterait ? Quand on voyait l’effet qu’un baiser rêvé lui avait fait, elle doutait sérieusement de sa capacité de résistance à une approche concrète…

Non, il ne fallait pas y penser. C’était idiot, stupide, fou, insensé… et normalement, elle était tout sauf ça. En quelques instants, cet homme l’avait fait douter de tout : peut-être qu’elle n’était pas aussi bien qu’elle le pensait, peut-être qu’une noire et sombre personne, capable de faire du mal et dominée par ses envies se cachait en elle… Mais en même temps, elle sentait bien que si elle maintenait la distance qui la séparait de lui, il la percevrait toujours comme une menace – si faible soit-elle. Et elle ne pourrait pas l’aider, si tant est qu’il voulait de son aide, car elle en doutait de plus en plus.

Alors elle avança vers lui, calmement, les bras croisés, pour se planter à quelques centimètres de cet homme.

« Je cours très vite, rassurez-vous. Mais surtout je ne rate jamais mon coup. Vous verrez que grâce à moi vous vous réveillez plus reposé. Et vous ne pourrez plus vous passer de moi. »

Non, vraiment ? C’était elle qui avait sorti ça ? Décidément, la Sonny du passé était bien loin…

« Je ne sais pas ce que vous avez vécu, mais des merdes on en a tous eu. Peut-être pas comme les vôtres, mais elles comptent quand même. Je sais que vous vous dites qu’une gamine comme moi ne doit rien savoir de la vie. Vous devriez faire un tour dans mes rêves une nuit… ils sont une belle torture aussi dans leur genre. Je voulais juste vous donner un coup de main. Les cauchemars ça me connaît. Maintenant, si vous préférez vraiment retourner dans votre cellule vous faire torturer, libre à vous, c’est votre rêve après tout. »

Que dire de plus ? Quelle preuve voulait-il pour la croire quand elle lui disait ne vouloir que son bien ?

« Oh, j’allais oublier. Vous vouliez savoir si vous vous rappelleriez de moi à votre réveil. Je serai un peu vexée si vous éprouviez et vous souveniez des tortures qu’on vous a infligées et pas de ça… »

Et là, Sonny l’agrippa par son t-shirt et l’embrassa avec fougue, collant tout son corps au sien. Ce n’était pas le petit baiser qu’il lui avait donné un peu avant, c’était un vrai baiser. Elle voulait le marquer, elle voulait être autre chose qu’un fantôme. Elle avait senti sa main tout à l’heure, et lui les tortures qu’on lui infligeait, alors ils devraient tous deux pouvoir se ressentir. Ou peut-être voulait-elle seulement avoir ce qu’elle voulait, au moins une fois dans sa vie, sans perdre de temps ? Parce qu’elle voulait avoir les mains d’un homme sur elle, le goût véritable de ses lèvres sur les siennes. Parce qu’elle en avait envie. Parce que dans un rêve, ça ne comptait pas. Peut-être que la fille bien s’éloignait peu à peu.

Quand elle trouva enfin la force de se détacher de lui, de son corps, elle ne s’éloigna pas, ne le lâcha pas, mais lui déclara le plus naturellement du monde :

« Tout ça n’est qu’un rêve, juste votre rêve… je ne ferai jamais cela si vous me croisez un jour. »

Il fallait qu’il en soit persuadé, il fallait absolument qu’il pense que tout cela n’était qu’un délire de son esprit. Sous aucun prétexte ils ne devaient se rencontrer une fois éveillés, cela, Sonny le savait au plus profond d’elle-même.
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeSam 11 Fév - 18:17

Menacer une inconnue dans un rêve, mon cas devenait de plus en plus grave. Il était peut être grand temps que je consulte un psychologue. J'avais une liste avec des noms que l'armée m'avait donné quand j'eus décidé de revenir à la vie civile. Les noms sur cette liste comptaient parmi les meilleurs de la profession au sein de la cité des Anges et peu importait celui que je choisirais, il était censé m'aider. S'il était aussi doué que le psychologue militaire qui m'avait rencontré après l'Irak, il ne ferait pas long feu et déchargerait mon cas à l'un de ses confrères, me qualifiant encore une fois de danger pour autrui mais également pour moi-même. Ma première intention était de m'amuser, aussi bien avec un médecin qu'avec cette femme qui se trouvait dans mon rêve. Mais j'en venais à la menacer, non pas dans le réel but de lui faire du mal, je n'avais aucune raison de le faire. C'était davantage une menace pour la protéger du grand méchant loup que j'étais. Sauf que si je lui disais ceci, elle risquait de me rire au nez et de me prendre pour un prétentieux. Ce que j'étais souvent mais pas tout le temps.

Lut-elle dans mon regard ce que je pensais de la distance qu'elle avait mis entre elle et moi, c'était fort possible. Elle couvrit la distance qui nous séparait, les bras croisés. Pour moi, cette position, c'était un signe pour montrer qu'elle était sûre d'elle, sans vraiment l'être. Elle tentait de se donner une certaine contenance, mais pour combien de temps avant qu'elle ne s'écarte ? Elle s'arrêta à quelques centimètres de moi et je pus détailler davantage ses traits. Ils me semblaient doux, je voulais m'en assurer en posant mes doigts sur son visage pour l'effleurer. Je ne le fis pas. Elle venait de me surprendre avec ses propos. Elle affirmait que je serais plus reposé à mon réveil, j'en doutais un peu. J'aurais plutôt comme un sentiment d'inachevé et si je me souvenais de tout, je me demandais si j'arriverais à la croiser une nouvelle fois, mais dans un rêve, dans la vie bien réelle.

Cette femme me contrariait intérieurement car elle faisait intervenir plusieurs interrogations. Comme celle de ne plus pouvoir me passer d'elle. Parlait-elle pour les rêves qu'elle adoucissait, ou pour son corps qui m'attirait tel un aimant. J'aimais semer le doute chez les gens, j'appréciais moins qu'on vienne le semer chez moi. En même temps, cela me fascinait. C'était la première fois que je rencontrais quelqu'un, même si c'était dans un rêve, capable d'attirer autant mon attention. Ses courbes jouaient en sa faveur mais il y avait quelque chose d'autre, je ne saurais expliquer ce que c'était. Peut être même que je ne voudrais jamais tenter de le comprendre.

Par contre, comprendre ce qu'elle avait vécu aiguisait ma curiosité. Une personne lui avait fait du mal et ça la tourmentait toutes les nuits. Il suffisait qu'elle me dise son nom et si ça pouvait l'apaiser, j'étais prêt à lui ôter la vie si ça pouvait adoucir la sienne. Rembobine le cours de tes pensées Remington... Depuis quand tu proposerais à une inconnue de l'aider et ce, gratuitement. Normalement je n'exécutais que des contrats rémunérés et là j'étais prêt à en faire un gratuitement. Il était vraiment temps que je me réveille, ce rêve était pire que mes cauchemars de la guerre d'Irak. Ce n'était pas une torture physique qu'il m'amenait mais une torture mentale qui commençait à me faire dérailler. C'était de sa faute à elle aussi, pourquoi m'avoir choisi moi. Pourquoi me torturer ainsi l'esprit en discutant dans mon rêve. Et pourquoi...

Je n'eus pas le temps de formuler ma nouvelle interrogation. La jeune femme venait d'agripper mon tee shirt pour plaquer ses lèvres contre les miennes. Cela n'avait rien à voir avec le léger baiser que je lui avais donné auparavant. Et après c'était limite si on m'accusait d'avoir l'esprit pervers dans mon rêve à l'embrasser et à émettre la supposition que l'on pourrait coucher ensemble. Je croyais être le seul à ressentir ce besoin, que mon corps soit attiré par le sien. Je me trompais. Je sentais son corps contre le mien, il ne manquait que la chaleur que le rêve enlevait. Mais je ressentais ces palpitations qui me parcouraient, qui me donnaient cette impression d'être bien vivant, même en plein rêve. C'était une sensation que je n'avais pas eu depuis bien longtemps, que j'avais cru morte même si je n'étais pas moine et qu'il m'arrivait de sortir avec une femme. Deux jours maximum, le temps d'assouvir mes besoins avant de retourner à ma vie de solitaire. Et là... Ce n'était pas moi qui venais de tirer en premier pour ce baiser fougueux. Elle avait tiré la première. Elle m'avait touché. J'étais foutu.

Comment résister à ce tourbillon de sensations qui m'envahissait, c'était impossible. Mes bras se refermèrent sur elle, mes mains se posèrent sur le creux de ses reins, la rapprochant davantage de moi, s'il y avait encore quelques millimètres qui séparaient encore nos deux corps. Pour la première fois de ma vie, je ne me sentais plus torturé, j'avais l'impression d'être apaisé et que le remède à tous mes maux c'était elle. Son corps, la passion de son baiser mais pas seulement ça. Il y avait aussi ses propos. C'était un tout en fait que je ne pouvais expliquer. J'en étais bien incapable pour le moment de toute façon, profitant de l'instant qu'elle m'offrait et auquel je contribuais en approfondissant notre baiser.

Ce fut elle qui trouva le courage de s'écarter la première. Elle me tenait encore, j'avais toujours mes mains posées dans le creux de ses reins. On pouvait qualifier cet instant de magique, celui où un baiser vous laisse pantois et vous empêche de réfléchir rationnellement, ne souhaitant qu'une chose, recommencer. Elle se sentit obligée de parler, fissurant cet instant. Le faisait-elle exprès ou était-ce le seul moyen qu'elle avait pour se redonner une contenance après le baiser qu'on venait d'échanger. Je voulais bien la croire quand elle disait que c'était mon rêve. Je voulais bien croire qu'on pouvait lui donner la tournure qu'on désirait. Mais je refusais ce qu'elle me dit ensuite.

« Je crois au contraire que tu recommenceras et qu'on le voudra tous les deux. C'est mon rêve oui. S'il y a un risque que j'oublie tout, je ne crois pas que ça soit le cas pour toi. Tu l'as dit toi-même que j'étais à ta merci, donc tu as le contrôle. Tu peux l'avoir aussi dans la réalité. A moins que tu laisses la peur te guider et te contenter de simples rêves... »

Naturellement, j'avais éliminé le vouvoiement pour adopter le tutoiement. Nous le pouvions après tout, on avait échanger deux baisers, ce n'était plus comme si nous étions complètement des étrangers l'un pour l'autre, du moins dans mon rêve. Si je me souvenais de tout, je me sentais capable de reprendre là où nous en resterions une fois que je serais éveillé. La peur n'était pas un sentiment que je connaissais, et je n'étais pas non plus du genre à ne pas tenter une chose de crainte de me brûler les ailes. Elle voulait me faire croire que c'était un simple rêve pour se protéger. De moi ou d'elle-même ? Je n'étais pas certain de ma réponse à cette question et je n'étais tout simplement pas dupe pour la croire et boire ses paroles. Ma main droite quitta ses reins et s'approcha de son visage que j'effleurais. Mes doigts écartèrent une mèche de cheveux, caressant sa joue. Je voulais davantage que ce simple rêve mais je ne pouvais la forcer. Alors j'eus un petit soupir qui pouvait laisser croire que j'étais résigné, même si j'étais loin de l'être.

« Je peux connaître ton prénom ou ceci aussi doit rester dans le mystère du rêve. »

Crétin. Son point de vue me contrariait mais cela ne voulait pas dire que j'avais le droit de me montrer cynique avec elle. Après tout elle avait tenté de m'aider et avait réussi à apaiser mon cauchemar même si elle semblait être décidée à me laisser un sentiment de frustration à cause de sa peur. Je ne m'excusais pas pour autant. Il était vraiment rare que je le fasse dans la réalité, alors dans un rêve. Et puis j'étais bien trop occupé à laisser glisser mes doigts le long de sa joue, descendant le long de son cou...
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeDim 12 Fév - 19:26

Chaud. Froid. Explosion. Néant. Frissons. Palpitations. Soif. Faim. Envie. Plaisir. Mais le tout en mode mineur, foutu rêve. Le baiser qu’elle venait de quémander déchira Sonny et annihila toute pensée en elle. Cet inconnu qui la fascinait tant répondit favorablement à sa demande. Sonny sentit ses mains, puissantes et grandes, fortes et douces à la fois, qui glissaient le long de ses hanches jusque sur ses reins. Oui, cela avait beau n’être qu’un rêve, ton son corps réagissait au contact de celui de l’homme. Depuis combien de temps n’avait-elle pas été touchée ainsi ? Impossible à dire et de toute façon, Sonny ne se souvenait plus de rien. Elle avait laissé libre cours à ses pulsions et mis son esprit en stand-by. Et c’était juste parfait.

Où trouva-t-elle la force de mettre fin à ce baiser ? Aucune idée. Peut-être que ses barrières mentales n’étaient pas encore toutes tombées. Non, si elle voulait être parfaitement honnête, elle devait admettre qu’elle ne se détacha de lui que pour se protéger, parce qu’elle savait très bien que maintenant qu’elle avait goûté à ses lèvres et avait eu un aperçu de la sensation de son corps sur le sien, elle serait totalement incapable de lui résister.

Et visiblement, il n’était pas dupe du tout de son petit jeu. Il l’avait percée à jour en quelques secondes et le lui fit clairement savoir. Il savait pertinemment qu’elle avait envie de lui et que ce désir irresponsable et inéluctable prendrait le dessus tôt ou tard. Bon sang, dire qu’elle ne s’engageait jamais à la légère, dire qu’il lui était arrivé de perdre des occasions parce qu’elle était trop hésitante… Une force grondait en elle, une force contre laquelle elle n’arriverait pas à lutter, et d’ailleurs, elle n’avait aucune envie de lui résister.

Et cet homme qui avait suscité tout cela en elle lui fit remarquer que ce serait bien elle qui recommencerait, qui réclamerait ce genre de corps-à-corps, réels cette fois. Sonny fut particulièrement vexée d’être aussi vite mise à nue, au sens figuré du terme. Il avait tout compris, tout. Le fonctionnement du rêve, son dysfonctionnement à elle. En la tenant toujours contre lui, il le lui fit savoir. La seule petite victoire pour Sonny, fut qu’il avoua qu’il ne serait pas du contre l’idée d’approfondir cette étreinte. Mais la suite la piqua dans son orgueil. « A moins que tu laisses la peur te guider et te contenter de simples rêves… ». Mais pour qui se prenait-il ? Savait-il seulement à quel point cette situation et ces sentiments étaient nouveaux pour elle ?

Non, bien sûr que non, il ne pouvait pas le savoir, comme il ne pouvait pas savoir qu’elle était rongée par la peur et la colère depuis le mois de juin. Il avait foutrement raison et cela l’enrageait. Et elle n’aimait pas être contrariée. Elle n’aimait pas être à ce point dominée.

Bien qu’il l’eût froissée dans son orgueil, elle ne répliqua pas. Elle ne le pouvait pas. Elle aurait voulu disparaître à nouveau, lui échapper, mais elle ne le pouvait pas. Et pour cause, l’homme avait laissé l’une de ses mains au creux de ses reins et avait remonté la seconde jusqu’à son visage. Ce simple geste la fit trembler. Pas de peur, non, c’était mille fois plus complexe que cela. Cet inconnu avait probablement vécu l’enfer, il devait baigner dans la violence et la souffrance, il devait même avoir pas mal d’ennemi pour l’avoir soupçonnée de chercher à le tuer. Et pourtant ses gestes étaient d’une douceur incomparable, presque tendres. Même son regard était double, dur, glaçant, assuré et en même temps, charmeur, charmant, doux.

Elle mourait d’envie de lui sortir une réplique cinglante, qui lui prouverait qu’elle n’était pas une trouillarde, mais il poussa un soupir et lui demanda son nom…

Son nom… Sonny réalisa qu’elle ignorait jusqu’au nom de l’homme entre les mains duquel elle n’était qu’une marionnette. Décidément c’était du joli. Que penseraient ses amis, que penserait sa famille ? Et cette simple question posée sur le ton de la provocation éveilla de nouvelles interrogations chez la jeune fille. Tout d’abord, faisait-elle vraiment partie de ces femmes qui couchent avec le premier venu, juste pour satisfaire une envie, et repartir le matin comme si de rien n’était ? Non, elle ne l’avait jamais été et ne le serait jamais. Et cette étrange expérience n’était pas le fruit d’un pur désir physique. Oh, bien sûr il était séduisant, attirant, intriguant, désirable, ça, impossible de le nier. Mais il y avait plus. Pas de l’amour, non, mais autre chose. Et elle savait que même si leurs corps se mêlaient, leurs liens ne se briseraient pas. Ce serait trop facile. Elle savait qu’elle reviendrait vers lui, comme aimantée.

Son nom… devait-elle le lui donner ? Parce que cela serait une étape de plus vers le réel. En lui disant qui elle était, elle deviendrait réelle et lui aussi. Et alors là, qui pouvait prédire ce qui allait se passer ? Elle voulait qu’il sache tout d’elle et qu’il ne sache rien, elle voulait tout connaître de sa vie et ne rien savoir, elle voulait qu’il disparaisse de sa vie et que cet instant ne s’arrête jamais, elle débloquait.

« Sonny Malone… »

Elle murmura presque son nom, redoutant que les tremolos dans sa voix, dus à la caresse des doigts de l’homme sur son cou, ne s’entendent.

Voilà que tout son corps tremblait à nouveau. Elle ressentait tout à présent et tout au long de la ligne invisible que la main de l’inconnu dessinait sur sa peau, ses nerfs explosèrent. Elle sentait chaque parcelle touchée par cet homme et savait que s’abandonner à lui ici et maintenant serait une torture. Une torture qui lui laisserait entrevoir bien des possibilités de plaisirs, mais qui les frustrerait tous deux en les privant de mille sensations comme la chaleur d’une caresse, l’odeur de son partenaire, l’effleurement du souffle de l’autre…

Une idée la tirailla alors. Une idée qui l’obséda. Le réveiller. Finalement, elle n’aspirait plus qu’à un réveil. Elle voulait continuer cette étrange rencontre en vrai, elle voulait sentir son souffle contre sa peau, un baiser au creux de son cou, percevoir les palpitations de son cœur contre le sien, sentir son odeur, trembler sous ses mains expertes. Et en même temps, son alarme, sa conscience qui lui hurlait que c’était une très mauvaise idée, résonnait toujours dans un coin de sa tête, mais de moins en moins fort.

Mais voilà, il l’avait vexée en insinuant qu’elle était lâche. Même si c’était vrai, qu’elle se cachait derrière sa capacité, qu’elle se protégeait à travers le rêve, son orgueil en avait pris un coup. Et ce fut cela qui acheva d’abattre ses remparts.

« Maintenant est-ce que toi tu auras le courage de me dire ton nom ? Et de me dire ce qui t’es arrivé, pour que je t’aide ? »

Glissant une main sous le tee-shirt du rêveur, elle sentit la force de ses abdominaux et perdit tout sens de la retenue. Elle se hissa alors sur la pointe des pieds pour être à sa hauteur et lui susurra :

« Tu dis que je me cache ici, dans mon rêve, mais toi aussi. Je suis curieuse de savoir si en vrai tu es du genre à embrasser des inconnues et les menacer ensuite. Si tu veux vraiment savoir si je suis lâche, il faut que tu te réveilles. Alors tu as le choix : la manière douce et tu te réveilles tout seul comme un grand, ou la manière forte et c’est moi qui m’en charge. Mais je n’ai pas trente-six solutions. Il faut que je te tue ici. Tu m’as demandé si j’avais le courage de tuer quelqu’un. Ici je l’ai. Mais toi, est-ce que tu auras la force de me regarder te tirer dessus sans te venger ensuite ? »

Déraillement mental…
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeMer 15 Fév - 15:17

Mes réactions commençaient à devenir pour moi un mystère inexplicable. J'avais l'impression de dévier de ma ligne de conduite, de ne plus suivre le sentier tout tracé que j'avais l'habitude d'emprunter et de me risquer sur des terrains inconnus. C'était vraiment tout le contraire du vrai Remington Pillsbury. Je n'étais pas du genre à faire une chose à l'improviste, quand j'agissais, j'essayais toujours dans la majorité des cas, de calculer pour avoir un ou deux temps d'avance, et au moins une porte de sortie. Mais là, dans ce rêve, je n'avais rien. J'avais l'impression qu'on me balançait sur un fil, tel un funambule, et qu'il n'y avait aucun filet de protection. Il me restait à déterminer si cette jeune femme se trouvait de l'autre côté du fil, au point d'arrivée, ou si elle représentait le vide qui se situait sous mes pieds. Je n'arrivais pas à réfléchir comme je le voulais, sans doute était-ce du au contexte du rêve qui faisait que je dormais et n'étais pas éveillé.

Malgré toutes les inconnues que ce rêve représentait, je ne perdais pourtant pas le nord et lui demandait comment elle s'appelait. Mais pourquoi venais-je de le lui demander. Sans doute n'avais-je pas pour habitude d'embrasser une inconnue sans connaître son nom. Je n'avais pas non plus l'habitude qu'on s'introduise dans mes rêves. Ma main courait le long de sa joue, glissant sur son cou. Mes doigts décrivaient des arabesques et je résistais à l'envie de déposer mes lèvres le long du trait invisible que je traçais. Je me demandais si je sentirais le goût de sa peau si je m'y risquais, tout comme je me demandais si j'étais prêt à accepter cette frustration si ce n'était pas le cas. Je connaissais déjà la réponse à mes questions. Je voulais aller plus loin, mais je refusais que ça soit sans saveur, chose que le rêve nous offrirait. Je ne voulais pas me réveiller en me disant que j'avais fait l'amour à une inconnue sans savoir si je la reverrais ou non.

Enfin, elle me murmura son nom qui raisonna dans mon esprit comme une douce mélodie. J'aurais pu prononcer à mon tour une phrase du genre enchanté de te connaître Sonny Malone mais cela aurait fait trop bateau et c'était une chose que je n'aimais guère. La routine, les bonnes conventions, c'était des choses qui me semblaient parfois abstraites. On venait de changer de président et puis ? Un gentleman se devait de saluer une dame correctement en toute circonstance. Et l'inverse, ce n'est pas de mise ? Tenir la porte, laisser sa place à une personne âgée, il y avait toute une liste que j'accomplissais pour ne pas choquer mais que de moi-même je trouvais inutile.

Sonny me regardait et je me demandais à quoi elle pensait. Le courage, voilà un bien grand mot qui voulait dire tout et n'importe quoi. Si avoir du courage c'était l'absence de peur, on pouvait dire que je l'avais. Si c'était accomplir une chose qu'on ne ferait pas en temps normal, également. Si c'était simplement dire mon nom, c'était banal. Je n'avais jamais été du genre à me cacher et je savais que je ne le ferai jamais. Il suffisait de savoir brouiller les pistes. Pas besoin de changer de nom, juste faire quelques modifications dans ses habitudes de vie pour ne pas sombrer dans une routine qui finirait par me perdre. Je l'avais fait avec ma famille d'accueil. Les pistes brouillées fonctionnaient toujours, je n'avais plus de nouvelle d'eux. Peut-être qu'ils avaient renoncé à me chercher dès la première année de ma disparition. Je ne l'espérais pas, je trouvais juste que c'était préférable pour eux.

« Remington Pillsbury. »

Ma réponse sortit spontanément, je n'hésitais pas. Pour ce qui était de raconter ce qui m'était arrivé, c'était une toute autre histoire. Je n'avais pas envie de voir dans le regard de Sonny ce que les autres yeux exprimaient quand je racontais mes années militaire et mon séjour en Irak, ponctué par ma captivité. Les « je compatis, je comprends » m'agaçaient un peu, voir même beaucoup. C'était si facile de compatir sur le sort de quelqu'un. Et affirmer qu'on comprenait c'était encore pire. Comment pouvait-on affirmer qu'on savait ce qu'était l'horreur de la torture sans l'avoir vécu soi-même. Sans avoir reçu des coups de matraque, sans avoir été tabassé à mort, sans avoir été électrocuté, brûlé par des mégots de cigarettes ou par un fer rouge. Comme si on voulait nous marquer comme du bétail, ce que j'avais l'impression d'être quand j'étais enfermée dans cette fichue pièce noire qui revenait sans cesse dans mes rêves.

Elle voulait savoir ce qui m'était arrivé pour m'aider mais si elle l'apprenait, ne partirait-elle pas plutôt en courant. J'étais un homme ravagé à l'intérieur, mes cicatrices en témoignaient à l'extérieur. A côté Sonny me semblait si loin de ce monde, si innocente. Elle avait bien cette cicatrice que j'avais aperçu sur son épaule. Peut-être que je voulais simplement croire ce qui m'arrangeait. Que seul moi pouvait avoir vécu l'enfer alors qu'elle y avait peut être également goûté. Encore une fois, j'analysais la situation, me demandant si j'allais lui répondre ou non. Elle parlait de courage, je pensais instinct de survie. Mes pensées déraillèrent perdant leur cours quand elle glissa une main sous son tee-shirt. Je ne savais pas si ses doigts étaient chauds ou gelés mais au fond de moi, je ressentis comme une brûlure. Je frissonnais légèrement à ce contact, ne me sentant plus vraiment en état de penser. J'entendais ce qu'elle me disait, même si ses mots me parvenaient au travers un brouillard, mon attention se focalisant sur cette main qui effleurait ma peau.

Un verbe me fit sortir de l'état dans lequel je venais de plonger. Tuer. Une lueur traversa fugitivement mes prunelles. Sonny venait d'attirer mon attention, la détournant des caresses prodiguées. Elle me mettait au défi, me laissant le choix sur la manière de me réveiller. Douce ou brutale. Si seulement elle savait...

« Je vais te dire ce qui m'est arrivé si tu me rejoins une fois que nous serons réveillés. Et tu comprendras peut-être la solution que je vais choisir. »

A peine avais-je fini de prononcer ces mots que je déposais un bref baiser sur ses lèvres. Il m'était impossible de ne pas céder à la tentation, surtout quand elle se mettait ainsi à ma hauteur et que nos visages étaient si proches. Je la soupçonnais soit de tenter de me dérouter avec ses choix, soit de les avoir proposé si prêt pour quémander silencieusement le baiser que je venais de lui donner. Je ne savais pas si elle s'attendait déjà ce que j'allais lui répondre sur la manière de me réveiller. Je savais déjà que ma décision n'était pas anodine. Elle pouvait sembler stupide, masochiste mais au fond, c'était celle qui était la plus adaptée à la situation. Si je me réveillais de moi-même, en douceur, il y avait de grandes chances que je ne me rappelle que des bribes du rêve. J'aurais le sentiment d'avoir vécu quelque chose de différent, de me rappeler certains faits qui s'estomperaient au fil des minutes si je ne restais pas concentré dessus. Si je la laissais me tuer, le réveil serait brutal, pas très confortable mais j'aurais l'impression d'avoir fait un cauchemar. Et par expérience je savais déjà qu'un réveil en sursaut permettait de se remémorer davantage de choses. Il y aurait donc très peu de chances que je ne me souvienne pas d'elle, ni de son prénom, ni du fait qu'elle m'aurait tué. Ca serait gravé en moi.

Ma main prit son poignet et retirait la main qui s'était glissé sous mon tee-shirt. Je reculais d'un pas ne la lâchant pas. Puis je levais sa main en même temps que la mienne, la mettant à la hauteur de ma tête. Elle me défiait, j'en faisais de même et si l'un de nous devait se dégonfler ça ne serait certainement pas moi. Je lui adressais un sourire en coin, confiant. Sans doute également complètement dingue.

« Vas-y, fais apparaître un flingue et tire. »

Ma main lâcha la sienne. Il n'était pas question que je continue à la tenir, je voulais qu'elle le fasse d'elle-même comme elle disait avoir le courage de le faire. Mon regard ne la quittait pas, je la fixais, attendant patiemment qu'elle fasse apparaître l'arme pour me tirer une balle entre les deux yeux. Je devais être complètement masochiste pour désirer une telle chose. Peut-être que j'attendais inconsciemment qu'on me donne la mort que j'aurais du avoir trois ans auparavant. La faucheuse ne m'avait pas pris, ne me laissant que des cauchemars avec lesquels je devais vivre avec. Laisser Sonny me tuer serait avec un peu de chance, le moyen d'exorciser certains de mes démons.

« Je te promets que je ne me vengerai pas si jamais ma réaction t'inquiète. Tire et nous verrons si au réveil tu es lâche ou si tu as le courage de me rejoindre... »

[C'est nul... Désolé....]
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeVen 17 Fév - 15:32

Remington Pillsbury… Ce nom était désormais gravé dans son cœur et dans sa tête. Et quelque part, loin au plus profond de sa mémoire, ce prénom ne lui était pas inconnu… mais où l’avait-elle entendu ? Sonny n’était plus en état de penser à quoique ce soit. Et puis de toute façon, le nom de famille ne lui disait rien du tout. Et puis peu importe, tout ce qui comptait pour l’instant, c’était sa peau contre la sienne, son visage à quelques centimètres du sien.

Mais décidément, ce Remington ne semblait pas décidé à lui faciliter la tâche. Encore un défi ? Ne pouvait-il pas lui parler normalement, sans avoir à passer par ce petit jeu de cap’ ou pas cap’. Elle détestait ce petit jeu en temps normal. Et en temps normal, elle lui aurait dit d’aller se faire voir. Mais là, clairement, rien n’était normal. Et en guise de défi, cette fois, Remington lui proposa un chantage : il lui révélerait ce qui lui était arrivé si elle le rejoignait. Bon sang, croyait-il vraiment qu’elle se sauverait ? Elle qui mourait d’envie d’être encore plus proche de lui ?

Bon, peut-être qu’une fois réveillée, hors de cette atmosphère, séparée du corps de cet homme, peut-être retrouverait-elle ses esprits. Mais franchement, elle tremblait tellement qu’elle doutait que cette sensation s’efface à son réveil. Tout son corps ne désirait que celui de cet homme, alors quand bien même il aurait refusé de lui parler, elle serait tombée dans ses bras. Mais autant qu’il ne le sache pas, autant qu’il n’ait pas trop conscience du pouvoir et de l’emprise qu’il avait sur elle…

Une fois qu’elle connaîtrait son histoire, elle comprendrait son choix, entre le réveil doux et le réveil brutal ? Voici qu’il parlait par énigme maintenant… Bon sang, elle avait envie de lui dire « embrasse-moi, espèce de crétin », mais en même temps, cet homme si mystérieux venait de lui promettre de lui raconter d’où provenaient ces cicatrices qu’elle sentait sous ses doigts.

Il lui déposa alors un furtif baiser sur les lèvres, alors qu’elle aurait attendu bien plus. Mais cette fois, il ne semblait pas décidé à lui concéder autre chose qu’un baiser volé. Au contraire, il s’écarta d’elle et retira même sa main baladeuse de sous son t-shirt. Pas avec violence, ni avec colère, mais ce geste de refus la frustra au plus haut point. Quoi ? Il n’avait plus envie d’elle, lui qui avait serré son corps contre le sien, qui l’avait embrassée en premier ? Orgueil blessé. Et là, elle se sentait comme une enfant à qui on venait de retirer son cadeau d’anniversaire : vexée, frustrée et encore plus désireuse de lui remettre la main dessus. Réaction puérile ou de femme clairement en manque, dans les deux cas, ça n’était pas bien brillant.

Intriguée, elle le laissa mener la danse. Tout doucement et sans détacher son regard dur du sien, il porta sa main à son visage, au niveau du front. Mais à quoi jouait-il ? Il y avait bien d’autres endroits plus intéressants où poser ses mains, alors pourquoi ne la laissait-il pas faire ?

Sonny déglutit et eut un haut-le-cœur quand elle comprit enfin où il voulait en venir. Il voulait la tester, la prendre au mot, la défier de faire ce qu’elle avait dit. Il mimait le geste et eut une terrible phrase qui résonna dans tout le corps de Sonny.

Il voulait qu’elle le tue, là, en tirant entre les deux yeux. Et il lui lança ce défi sans se débiner, en souriant. Parce qu’il savait que c’était pour de faux ? Qu’il ne craignait rien ? Ou parce que… Il lui lâcha le poignet, et Sonny fut incapable d’esquisser le moindre geste. Elle ne pouvait ni baisser le bras, ni ironiser sur la situation. Et lui, il ne tremblait pas. Une froide résolution brillait dans ses yeux, ce qui contrastait avec son sourire et son visage presque serein.

Il lui jura qu’il la laisserait faire, mais ce fut à peine si Sonny l’entendit. Elle n’avait pas menti, elle avait déjà tuer des gens en rêve, mais jamais de façon frontale, jamais en les regardant dans les yeux, jamais avec autant de… sentiments. Elle n’aimait pas cette méthode, elle n’aimait pas ce pouvoir de vie et de mort. Elle avait peur, elle était perdue. Si elle faisait ça, ça serait la porte ouverte à tous les débordements. Le premier pas était le plus difficile à faire, les autres suivraient, dangereusement, sur une pente affreusement glissante. Si elle l’empruntait, elle ne pourrait plus faire marche arrière et cela, elle en avait pleinement conscience.

C’était contre ses principes, contre tout ce que lui avait enseigné Anne et Liam, c’était tout sauf elle. Et pourtant… pourtant c’était elle qui avait proposé cette solution, c’était elle qui avait juré à Remington de tout faire pour l’aider, et elle le voulait vraiment.

Si elle le tuait, elle se perdait. Si elle refusait, elle le perdait. Voilà, l’équation était aussi simple que ça.

Remington était si… spécial, si différent. Il avait tout perdu, tout vécu. Il s’était perdu, cela ne faisait aucun doute… Et elle, Sonny ? Pouvait-elle encore se sauver ? Qu’avait-elle à sauver ? Sa dignité ? envolée depuis trois baisers. Sa morale ? bah, pareil. Sa vie ? partie en fumée depuis des mois…

Et si elle était là, la solution à tous ses problèmes ? Si elle pouvait disparaître, perdre la Sonny du passé, déjà presque entièrement morte avec ses amis ? Est-ce qu’en tirant sur Remington, elle ne tuerait pas ces lambeaux de passé qui lui collaient à la peau ? Tuer Remington, tuer Sonny et recommencer…

Sa respiration se fit de plus en plus haletante, mais elle fit apparaître une arme dans la main, le canon immédiatement collé au front de Remington. Sa main vacillait. Elle se mordit les lèvres.

« Rendez-vous au niveau de la fontaine. »

Puis en un quart de seconde, elle baissa son bras, fondit sur Remington, l’embrassa furtivement, braqua l’arme et tira.

Un coup, sec. Le front plissé, le regard dur rivé dans celui de cet homme qui la faisait sortir d’elle, Sonny tira. Et fut surprise que ce soit si facile. Tout était si facile quand on laissait ses pulsions prendre le pas…

Par contre, l’expulsion du rêve fut plus douloureuse. C’était comme être projeté à plus de cent trente kilomètres heures… enfin, Sonny ne pouvait qu’imaginer que cela faisait cet effet. Elle se réveilla en sursaut. Elle avait chaud. La faute au soleil ou à Remington ? Difficile à dire. Regardant autour d’elle, pour voir si sa fâcheuse manie de parler en dormant n’avait pas trahi quelques gémissements, elle constata que visiblement ses voisins ne lui avait prêté aucune attention.

Malgré l’épuisement que cette intrusion aurait dû susciter, une force nouvelle et irrépressible poussa Sonny à se lever. Trop d’adrénaline dans le sang, trop de besoins à combler. Elle se releva et se mit à courir. A courir comme si sa vie en dépendait. A courir à en perdre le souffle. Jusqu’à la fontaine. Il y avait du monde, des jeunes, des vieux, des grands, des petits. Mais pas de Remington. Où était-il ? Allait-il vraiment venir ? Elle le cherchait du regard partout, ses nerfs lâchaient un à un, réclamant la présence de Remington comme un drogué réclame sa dose.

Et s’il ne venait pas ? Et s’il croyait qu’elle avait choisi un lieu exposé aux regards de tous juste pour l’éviter, alors qu’elle n’avait cherché qu’un point de repère ? Et s’il ne la trouvait pas belle ? Et s’il se rendait compte qu’elle n’était qu’une paumée ? Et si la réalité lui plaisait moins que le rêve ? Et si ses baisers le décevaient ? Et si …
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeSam 18 Fév - 8:07

Ma décision était prise et je ne reviendrai pas en arrière. Sonny m'avait laissé le choix, je venais de prendre celui qui était le plus adapté à la situation. Le plus dingue également et qu'un être normal, ayant peur de la mort, n'aurait jamais pris. Une chose qui caractérisait bien l'homme, c'était cet instinct de survie qui l'animait. Peu importait les circonstances, le lieu, les conditions, l'homme était fait pour survivre. Il ferait tout pour rester en vie même si c'était au détriment d'autrui. Il était prêt à tuer si ça pouvait sauver sa peau. Les inconscients se laissaient mourir sans réagir. Les fous choisissaient la mort plutôt que la vie. Pour se libérer, partir en quête d'une révélation qui n'apparaîtrait peut être jamais. Est-ce que j'espérais voir cette révélation au réveil ? Non, certainement pas. Je voulais seulement me souvenir. De son nom. De ses baisers. De ses doigts parcourant ma peau. J'étais prêt à me torturer moi-même pour ne pas oublier. Et je lui imposais mon choix. Je décidais qui devait vivre ou mourir et dans ce rêve, c'est moi que la faucheuse viendrait prendre.

Je sentis bien qu'elle n'était pas à l'aise avec ce que je demandais. Tout comme je ressentis au fond de moi qu'elle le ferait. Aussi bien pour elle que pour moi. Il fallait exorciser. Cela allait au delà des défis qu'on se lançait, ou plutôt que je lançais. Au petit jeu de savoir si on était capable ou pas capable de faire une chose, je le gagnais dans quatre vingt dix huit pour cent des cas. Il y avait ce faible pourcentage de deux qui faisait que je pouvais perdre. Il fallait juste savoir quel sujet il concernait. C'était le plus évident à voir mais on n'y pensait jamais. Ce qui m'arrangeait bien et me sauvait la mise.

Je regardais Sonny avec confiance, attendant qu'elle se décide à passer à l'acte. Je n'avais pas menti. Je ne lui en voudrais pas si elle tirait et me tuait. La vengeance n'effleurerait même pas mon esprit. Comment le pourrait-elle alors qu'elle m'offrirait une délivrance ? Les secondes s'écoulaient lentement et rien ne venait. Elle devait réfléchir à la situation, évaluer les pour et les contre. Se demander les conséquences que son geste aurait sur elle-même. Tuer quelqu'une, même si ce n'était pas la première fois, et même si c'était dans un rêve, ce n'était pas banal. Je gardais encore en mémoire le regard de la première personne que j'avais tué au cours d'une de mes missions en Irak. On nous avait préparé à cela. On avait vu des psychologues, on nous avait bourré le crâne, nous rabâchant une histoire de devoir pour la patrie, pour la sauvegarde du pays et de la paix dans le monde. Tous les beaux discours des bureaucrates ne remplaçaient pas la réalité. Ils n'ôtaient pas ce sentiment qui prenait possession de nous quand on réalisait qu'on venait de tuer quelqu'un pour la première fois de sa vie. Un mélange de culpabilité, de devoir accompli, de remise en question sur soi-même. Et un regard qui ne nous quittait pas tout au long de notre vie et qui resterait à jamais gravé dans notre mémoire.

Sonny avait pris sa décision. Nous étions trop proches pour que je ne remarque pas le changement dans sa respiration. Je savais qu'elle allait le faire. Je ne savais pas ce que cela lui coûterait au fond d'elle-même et je ne lui poserai pas la question à moins qu'elle ne veuille en parler la première. Je n'esquissais aucun geste pour l'encourager ou la réconforter. Cela pouvait être mal interprété. Elle pouvait finir par renoncer. Mon regard était simplement confiant et il ne vacilla pas quand l'arme apparut. Ce n'était pas la première fois qu'on me tenait en joue. Le canon était collé sur mon front. Je ne ressentais rien mais j'imaginais le froid que devait occasionner le contact du métal contre ma peau. Je sentis l'arme qui s'écartait de quelques millimètres de moi, réagissant au vacillement de la main de la jeune femme.

Elle me donna rendez-vous au niveau de la fontaine. Bang, elle allait tirer. Non, elle prolongea le suspens de quelques secondes – oui c'était du suspense à mes yeux et non une torture. Je n'eus pas le temps de réagir que je sentais ses lèvres poser sur les miennes. Et l'instant d'après, je me sentis partir. Douceur puis brutalité. Elle l'avait fait. J'étais mort dans mon rêve, conformément au souhait que j'avais exprimé.

Le retour à la réalité fut brutal. J'avais l'habitude de me réveiller en sursaut à cause de mes cauchemars. Pourtant là, j'avais l'impression que c'était pire que ce que je pouvais ressentir en temps habituel. Je me redressais brusquement me mettant en position assise. Ma respiration n'était pas régulière. J'avais cette impression d'être en sueur. Et durant un court laps de temps, je ne savais plus où je me trouvais. Les rayons du soleil m'aveuglèrent et je dus mettre mon bras en barrage pour m'habituer à cette luminosité trop brusque et à laquelle je n'étais pas préparé. Il me fallut quelques secondes avant de réussir à ouvrir les paupières. Ma main se baissa. Je sortis de ma poche mon paquet de cigarette et en glissais une entre mes lèvres. Je sortis mon briquet et au moment où je voulus allumer ma clope, je remarquais que mes doigts tremblaient. C'était une chose qui ne m'arrivait jamais. Je regardais mes mains comme si je les découvrais pour la première fois de ma vie, comme si je venais de faire une grande découverte qui changerait la face du monde et que je n'en croyais pas mes yeux, n'osant y croire. Je ne cherchais pas à comprendre ce qui m'arrivait, j'étais simplement éberlué par la situation.

Sonny...

Ce prénom résonna brusquement dans ma tête, me ramenant au pourquoi je m'étais réveillé si brutalement. J'en lâchais la cigarette non allumée qui tomba dans l'herbe. Je ne me rendis même pas compte que mon briquet retournait au fond de ma poche. Je me levais brusquement, manquant perdre l'équilibre au passage. Combien de temps avais-je rêvé pour paraître ainsi autant déboussolé. Je sentis le regard d'une personne posée sur moi. Elle devait se demander ce qui m'arrivait. Peu m'importait ce qu'elle pensait. Elle pouvait engager la conversation, je l'ignorerai. Je rassemblais mes esprits tout en regardant autour de moi.

Puis je me mis à marcher dans une direction. La fontaine. D'abord d'un pas lent qui s'accéléra progressivement. Et avant même que je m'en rende compte, j'étais en train de courir. J'avais fait le bon choix pour le réveil. Je me souvenais des baisers. De ce sentiment que mon corps réclamait à corps perdu un autre, désireux de s'accrocher à lui comme si c'était une bouée de sauvetage qui me garderait en vie. Il ne me fallut pas longtemps pour rejoindre la fontaine. Quand je l'aperçus, je m'arrêtais de courir, reprenant une allure plus normale. Je reprenais mon souffle alors qu'une seule question prenait possession de moi.

Serait-elle là ?

Je scrutais les visages un par un. Je ne l'avais vu que dans mon rêve mais je savais que je la reconnaîtrais dans la réalité. A moins qu'elle n'ait changé complètement son apparence. Je déclinais cette option. Elle était maitresse des rêves, elle n'avait aucune raison de se cacher. Pas en étant en position de force. Je contournais la fontaine toujours à sa recherche. Et enfin je la vis. Elle me tournait à moitié le dos. Elle bougea et je pus voir son visage de profil, ayant confirmation que c'était bien elle. Au fond de moi, je ne me sentais pas bien. Je mettais ça sur le compte du brusque retour à la réalité, sur le compte de cette femme qui se tenait à quelques mètres de moi et qui avait accepté de me donner la mort pour me souvenir. Je ne me rendais même pas compte que j'avançais vers elle, tel un automate que l'on règle pour un geste mais qui ne saura jamais ce qu'il fait. Je couvris la distance qui nous séparait.

« Sonny... »

Était-ce réellement moi qui venait de parler ? Je ne reconnus pas le son de ma voix tellement elle me paraissait rauque. Ma main se leva et se posa sur l'épaule de la jeune femme. Je me contentais de ce simple geste alors que tout en moi réclamait davantage. Je ne voulais pas l'effrayer. Je refusais de la brusquer pour ne pas la voir partir en courant. De la peur qui me tiraillait ? Peut être bien, je n'expliquais pas ce sentiment qui me déchirait et qui ne me caractérisait pas du tout. Dans le rêve, tout était permis. Mais là, c'était la réalité. Nous n'étions pas seul, des gens nous entouraient. Je savais que mes réactions resteraient les mêmes mais qu'en serait-elle des siennes ? Et si cette impression que j'avais eu sur elle dans mon rêve n'était qu'une tromperie que je me faisais à moi-même ? Et si le retour à la réalité avait tout cassé et que l'aimant qui nous attirait l'un vers l'autre ne faisait plus son travail ?
Je me mordis la lèvre, n'ayant aucune réponse à mes questions mais sachant qu'elles ne tarderaient pas à venir d'elles-même...
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeDim 19 Fév - 11:06

Elle l’avait fait. Elle avait embrassé un homme dont elle ne savait rien. Elle lui avait révélé son pouvoir, son fonctionnement, du moins en partie. Elle l’avait tué. En le regardant droit dans les yeux, elle avait fait une chose dont elle ne se croyait pas capable. Et elle n’en éprouvait aucune honte, aucun regret, aucun remords. Elle s’était comme libérée. Et elle avait fait ce qu’il attendait d’elle. Elle le savait.

Elle savait qu’il ne lui en tiendrait pas rigueur. Elle savait qu’il y avait une raison pour laquelle il lui avait demandé ça. Et il ne cherchait pas qu’à la tester. Elle l’avait vu dans ses yeux. Il cherchait autre chose. Pour lui et seulement lui. Et ce que cela l’avait aidé au moins ? Elle l’espérait. Sincèrement. Quand bien même il décidait de ne pas venir, de la laisser planter là. Parce que même s’il ne venait pas, elle ne pourrait pas le haïr. Elle serait évidemment vexée et blessée, mais il l’avait aidée. Qu’il en ait conscience ou pas, il l’avait aidée. A oublier, à s’oublier, à être forte, à faire ses choix, à s’écouter.

Elle lui devait beaucoup. Beaucoup. C’est vraiment étrange, la vie, comme elle peut vous emmener sur des chemins auxquels vous n’auriez jamais songés, comme elle vous fait rencontrer des gens que vous n’auriez jamais dû rencontrer, et qui bouleverse votre vie. Très naïf comme vision, mais c’était vrai. Remington, en quelques minutes, avait changé quelque chose en elle. Elle n’aurait jamais agi comme ça, avec qui que ce soit d’autre. Comment expliquer ça ? Impossible et quelle importance ? Elle aimait cette sensation de se sentir vivante. De se sentir dépossédée de soit, mais dans le bon sens, quand on perd le contrôle mais qu’on sait que quelqu’un va vous rattraper.

Mais allait-il vraiment la rattraper dans sa chute ? Parce qu’elle avait accepté de sauter. Et s’il n’était pas là, dieu sait jusqu’où elle plongerait. Pouvait-elle lui faire confiance ? Il fallait qu’elle le sache.

Elle entendit son nom… La voix était différente, mais la main sur son épaule… elle aurait reconnu son contact entre mille, dans l’obscurité la plus totale. A une différence près maintenant : elle pouvait sentir la chaleur de sa paume, à travers son t-shirt. Et cela faisait une sacrée différence.

Il était là, bien réel cette fois. Toujours aussi grand, toujours aussi envoûtant, toujours aussi Remington. La seule chose de différente, c’était son regard et le tremblement dans sa voix. Regrettait-il ? Etait-il déçu ? Avait-il… peur ? Non, c’était idiot. Peur de quoi ? D’elle ? Ridicule. Peut-être que, comme elle, il n’avait tout simplement pas l’habitude d’embrasser une inconnue dans un rêve, de se réveiller à l’aide d’une arme à feu, et de désirer toutefois revoir cette personne.

C’était étrange de le voir ainsi. Presque hésitant, alors qu’il avait mené le jeu dans le rêve. C’était très déstabilisant, parce que cette facette de Remington était tout aussi attirante, intrigante. Elle le dévisagea un instant et ne sut plus comment agir. En fait si, elle savait. Remington lui avait appris à ne plus hésiter, alors elle ne voulait pas qu’il voit la Sonny timide, hésitante. Elle voulait qu’il voit la Sonny du rêve, celle qu’il avait accepté de suivre. Un mirage ?

Avec lenteur, elle prit la main de Remington qui n’était pas sur son épaule. Bon sang, rien que la chaleur de sa main dans la sienne lui secoua le sang. Alors elle n’y tint plus, et voulu savoir quel goût avaient ses lèvres, elle voulait sentir la chaleur de son corps sur le sien.

Merde pour les promeneurs, pour les enfants, pour les petites vieilles qui se régaleraient de commérages, elle tira Remington d’un coup sec pour l’attirer contre elle et elle l’embrassa comme elle n’avait jamais embrassé personne. Ça vous paraît ridicule et gamin, l’image du feu d’artifice pour décrire un baiser ? Parce que c’était exactement ce que Sonny éprouvait. Ses lèvres étaient douces et en même temps, avides de baiser. Et sa bouche à elle glissa jusque dans le cou musculeux de Remington. Elle sentait son sang sous ses lèvres, la rugosité de sa peau, son odeur qu’elle reconnaîtrait à coup sûr.

Elle se colla à nouveau à lui, comme dans le rêve, mais cette fois, malgré leurs vêtements, une chaleur se dégageait. Une chaleur à la fois agréable et douloureuse. Etrange sensation. Sonny instinctivement conduisit la main de Remington au creux de ses reins, là où quelques minutes plus tôt il l’avait tenue. C’était trop… Trop de plaisir, trop d’émotion. Elle perdait pied et il allait gagner. Elle lui avait tout sacrifié, elle avait pris les devants, elle avait exécuté sa volonté, elle avait appuyé sur la gâchette. Il n’avait fait que la défier depuis le début et elle avait plié sur tous ses principes. Qu’aurait-elle en échange ? Il coucherait avec elle et puis quoi ? Allait-il vraiment lui dire ses secrets ? Allait-il s’intéresser un tant soit peu à elle ? Si elle se donnait à lui, serait-il encore là le lendemain ou se retrouverait-elle dans un lit vide et froid ?

Et là, sans qu’elle sache ni comment, ni vraiment pourquoi, elle se dégagea de Remington et lui colla une gifle telle qu’elle eut la main endolorie.

« Non ! C’est trop facile ça ! Dans le rêve c’était facile pour toi ! C’est moi qui t’ai embrassé, c’est moi qui ai dû te regarder mourir, c’est moi qui ai dû appuyer sur la gâchette ! Tu n’as fait que me défier depuis le début ! Tu n’as pas le droit de gagner, de t’envoyer une fois en l’air avec moi et de me jeter comme une vieille chaussette. Je ne suis pas comme ça. Je me suis battue contre toi ! A toi de te battre maintenant ! J’ai fait tout ce que tu m’as dit ! Je ne veux pas de ça ! Enfin, si je veux… enfin, je ne veux pas qu’on passe du bon temps et qu’on disparaisse. Je veux savoir pourquoi tu m’a obligée à te tirer dessus. Je veux pouvoir avoir confiance si je plonge. On gagne tous les deux ou on perd tous les deux. »

Voilà, c’était officiel, elle était cinglée. Et elle avait tellement honte qu’elle se détourna de Remington et commença à s’éloigner. Folle, elle était folle. Parce qu’elle tenait à lui, plus que de raison. Parce que fidèle à elle-même, elle était en train de tout gâcher. Parce qu’il n’allait quand même pas la suivre ? Bon sang, faites qu’il la suive, faites qu’il comprenne qu’elle avait besoin de lui. Faites qu’il hurle contre elle, faites qu’il se batte contre elle. Faites qu’il l’embrasse, rien que ça. Faites qu’il l’embrasse vraiment, pas comme les deux baisers volés qu’il lui avait donnés. Faites qu’il comprenne tout ce que cela lui avait coûté, tout ce qu’il avait bouleversé. Dans le monde du rêve, son monde à elle, elle avait accepté de jouer le jeu, de faire des choses qu’elle n’aurait jamais faites. Maintenant, ils étaient dans la réalité, c’était à lui de se battre, de faire quelque chose d’encore plus dingue que d’accepter le rendez-vous d’une inconnue. Faites qu’il relève le défi. Elle ne voulait pas gagner, elle ne voulait pas perdre. Elle voulait juste qu’ils soient sur un pied d’égalité, qu’il s’humilie comme elle s’était humiliée, qu’il l’embrasse comme elle l’avait embrassée, qu’il relève son défi comme elle avait relevé le sien. Elle voulait un match nul et pas un game over pour l’un ou l’autre.
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeLun 20 Fév - 18:25

Perdre le contrôle et ne pas réussir à le rattraper. Avoir l'impression que mon esprit était sorti de mon corps et regardait les gestes mécaniques que j'étais en train de faire, ne reconnaissant pas le corps auquel il appartenait. Oui, car cette main posée sur son épaule, cette voix rauque et hésitante, ce n'était pas moi. Je ressemblais davantage à un jeune premier qui allait sortir pour la première fois avec une femme. Gentillesse, douceur, il ne manquait plus qu'une pointe de romantisme, que je cours lui acheter une rose pour la lui offrir et ça serait le comble. Je me ferai horreur à moi-même et je n'aurai plus qu'à me mettre une balle dans la tête pour abréger la folie mentale qui me gagnerait. Etait-il possible d'aller plus loin sans se dévoiler, sans se forcer à être ce que nous n'étions pas ?

Je me posais la question. Je me rendais compte aussi que je me posais trop de question depuis que j'avais rencontré Sonny dans mon rêve. Elle chamboulait toutes mes habitudes, me perturbait car mon cauchemar ne s'était pas fini comme il terminait normalement. Certes elle m'avait un peu apaisé. Certes elle m'avait donné une mort brutale. Mais il manquait l'épisode de la torture. J'avais droit à la mentale alors que c'était la physique que je vivais dans mes songes. Cela perturbait mes habitudes, comme si j'étais un petit vieux avant l'âge qui ne supportait pas que son rituel ne se passe pas comme d'habitude. Il fallait que j'arrête, j'étais en train de me prendre trop la tête. Surtout pour une inconnue aussi attirante soit-elle.

Mais comment arrêter quand elle prenait l'initiative de prendre ma main dans la sienne. Alerte rouge, je ressemblais de plus en plus à cet adolescent transi qui se rendait à son premier rendez-vous. Qu'on vienne me sauver. Et pourtant... J'appréciais ces doigts entrelacés aux miens. Cette chaleur qui traversait nos paumes et qui donnait l'impression d'être vivant. Je n'étais plus dans le rêve. Il fallait que j'arrête avec mes conneries, que je mette mon cerveau en mode pause pour me laisser guider seulement par mon instinct. Il ne m'avait jamais trompé, pourquoi le ferait-il à cet instant, à part si c'était pour me servir de leçon ? Mon instinct me jouait pourtant des tours car je ne prenais aucune initiative. Il fallait peut être que je me plonge la tête dans la fontaine pour me remettre les idées en place et me sortir de cette position qui me figeait. Me noyer ou alors noyer l'ensorceleuse qui se tenait à mes côtés, c'était peut être une solution.

Mon idée de la noyer pour rompre l'envoûtement s'évapora en même temps qu'elle m'attira contre elle et m'embrassa. C'était pire que dans le rêve. Du moins pire dans le sens bien meilleur. La frustration qui m'avait gagné quelques minutes auparavant s'évapora brusquement alors que je ne me concentrais plus que sur ce baiser. Voilà qui venait interrompre toutes les interrogations qui me venaient et qui finiraient par me bouffer de l'intérieur si je continuais à me les poser. Un ulcère à l'estomac à se poser des questions stupides, voilà qui aurait été bien bête. Et voilà que j'arrêtais de penser pour me laisser emporter. Enfin je pouvais goûter à ses lèvres sans avoir la frustration de ne pas en deviner le goût. J'avais l'impression que le temps s'était arrêté autour de moi. Certains décrivent des feux d'artifice. D'autres voient des petites lumières quand ils ressentent quelque chose qu'ils n'ont jamais vécu jusqu'alors. Moi c'était une impression de temps figé. L'eau s'était arrêtée de couler de la fontaine. Je n'entendais plus les enfants courir et rire. Les petits vieux discuter sur leurs bancs. Je n'entendais plus non plus le bruit des roues des vélos sur les graviers. Tout s'était figé et la seule chose qui restait en mouvement, c'était Sonny et moi. Cette sensation me faisait bizarre, presque une boule au creux du ventre. Elle était à la fois réconfortante, elle me réchauffait mais en même temps je la trouvais super désagréable car elle me guidait vers l'inconnu. Je n'étais pas un moine, loin de là. Je sortais avec des femmes un jour.. Deux, trois grand maximum. Mais avec Sonny j'avais le sentiment que ça serait différent et que je plongeais vers l'inconnu.

Je ressentis un manque quand elle détacha ses lèvres des miennes. Je n'étais pas rassasié de ses baisers, c'était beaucoup trop tôt. Et je refusais d'envisager l'hypothèse que je ne puisse jamais en être rassasié. Elle ne pouvait pas devenir une drogue pour moi, ce n'était qu'une femme et non une substance illicite. Quoique si on y songeait bien, les femmes pouvaient être le pire de tous les poisons. Il y avait bien d'autres termes qui auraient pu me venir à l'esprit mais je me mis en mode blocage de termes négatifs envers Sonny. Du moins pour le moment. Le temps que j'apprécie à sa juste valeur ce corps serré contre le mien. Ma main qu'elle avait guidé jusqu'au creux de ses reins et qui glissa sous son tee shirt pour caresser avec douceur sa peau. La bienséance voulait que je ne le fasse pas, des personnes nous entouraient. On avait fini de bien se comporter au moment où elle avait posé ses lèvres sur les miennes. Et ce n'était que le début.

Peut être pas... Je ne compris pas ce qui se passa jusqu'à ce que je ressente une vive douleur dans la joue. Elle venait de me gifler. Je n'avais rien fait de mal pourtant, du moins c'était ce que je pensais. La chaleur gagnait ma joue et celle-ci était beaucoup plus désagréable que nos mains entrelacées, que sa joue descendant le long de mon cou, ou que ma main caressant ses reins. Je ne fis aucun geste. Généralement quand on se prend une baffe, on porte machinalement sa main sur la joue pour se prouver que ce n'était pas un rêve. On pouvait également avoir une réaction brusque et rendre le coup. Je ne fis rien, me contentant de fixer Sonny alors qu'elle prenait la parole.

Je tentais de la suivre mais j'avais du mal. Elle me faisait des reproches sur le rêve ? J'avais un peu l'impression que c'était le monde à l'envers. N'était-ce pas elle qui s'était introduite dans mon rêve ? N'était-ce pas elle qui m'avait dit que c'était son domaine et qu'elle était capable de tuer si elle le souhaitait ? N'était-ce pas moi qui avais posé mes lèvres en premier sur les siennes ? Et maintenant elle me reprochait de gagner alors que pour une fois je ne voyais pas cette rencontre comme un jeu dont il fallait absolument sortir vainqueur. Enfin si, au début peut être mais il y avait davantage que cela. Elle voulait que je me batte. Pour qui ? Pour quoi ? Pour elle ? Mais...

Folle... J'étais tombé sur une folle qui me tournait le dos à présent et commençait à s'éloigner. Bon débarras. Non, je n'arrivais pas à me dire ça. Sa dernière phrase restait gravée dans ma tête. « On gagne tous les deux ou on perd tous les deux. » Elle voulait que l'on soit à égalité, chose dont je n'avais pas l'habitude. Je n'aimais pas perdre mais un match nul, c'était peut être pire qu'une défaite à mes yeux. On n'avait pas ni sentiment victorieux, ni sentiment de revanche. Qu'elle aille au diable, il était hors de question que ça se termine sur un draw. Pourquoi je ne me détournais pas dans ce cas et que mes prunelles restaient fixées sur cette silhouette qui s'éloignait. Détourne-toi Remington... Lance un regard noir aux passants qui te regardent bizarrement depuis que tu as pris cette baffe... J'avais promis de ne pas me venger si elle me tirait dessus mais pas de ne pas me venger pour cette baffe. J'avais également dit que je lui raconterai ce qui m'était arrivé. Si encore elle m'avait laissé en placer une... Fichue femme...

Au lieu de prendre la direction opposée, voilà que je la suivais. Je n'eus pas besoin de courir pour la rattraper, seulement d'allonger le pas. Quand je parvins à sa hauteur, je ne choisis pas l'option de la toucher, seulement de lui barrer la route et de la fixer.

« On t'a déjà dit que tu étais légèrement cinglée ?  Normalement quand je rencontre une folle, je m'en éloigne pour préserver ma santé mentale. Mais bizarrement, là je ne peux pas et je ne sais pas pourquoi. C'est physique oui. C'est sûr même qu'on va s'envoyer en l'air. Mais il y a autre chose d'inexplicable entre nous et je compte bien découvrir ce que c'est ! »

Et à cet instant je sus que le jour où je le découvrirai, on ne gagnerait pas mais on perdrait tous les deux... Je remarquais du coin de l'oeil un couple qui nous regardait bizarrement. Ils n'avaient peut être pas apprécié que je dise tout haut qu'on allait s'envoyer en l'air. Je poussais un soupir quelque peu exaspéré et d'office je pris la main de Sonny pour l'entraîner avec moi un peu à l'écart. Non pas que ça me dérangeait que d'autres entendent qu'on allait s'envoyer en l'air mais pour la suite, je risquais de dire des choses qui ne devaient pas arriver aux oreilles de certains. Une fois que je l'eus emmené à l'écart, je lâchais sa main. J'aurais aimé la foudroyer du regard car elle m'exaspérait un peu par son comportement mais j'en étais incapable. J'avais plutôt une furieuse envie de l'embrasser mais je me retins, plongeant les mains dans mes poches. Obligé car si je me contentais seulement de l'embrasser elle allait m'accuser encore de vouloir seulement la sauter. Elle voulait que l'on soit sur un pied d'égalité, elle voulait avoir confiance. Très bien, c'était ce qu'elle allait avoir.

« Si j'ai voulu que tu me tues, c'était pour me souvenir de tout. Un réveil en douceur ne m'aurait pas garanti que je me rappelle toute notre rencontre, cette sensation agréable et d'inconnu qui m'a gagné dans le rêve et qui m'habite toujours même si on est éveillé. C'était pour te provoquer mais j'ai choisi également cette option pour moi. La mort ne me fait pas peur. J'ai vécu l'horreur en Irak alors une balle dans la tête dans un rêve, c'est une douceur à côté.. Tu veux avoir confiance, tu veux que ça se termine sur une égalité... Dans ce cas là, autant t'avouer que j'ai un don comme le tien. Je peux me transformer en lynx même si j'évite de le faire. »

Je haussais légèrement les épaules à l'évocation de mon don qui n'était pas un point fort à mes yeux. Sur le moment, quand j'étais transformé, peut être qu'il pouvait m'aider. Il m'avait même sauvé la vie en Irak. Mais le retour à ma forme humaine était beaucoup trop contraignante. J'étais vulnérable à ce moment là et je détestais ne pas pouvoir me défendre comme je le désirais. Même si je n'étais pas transformé, je me sentais tout autant vulnérable face à Sonny. Mes poings se serrèrent au fond de mes poches. Puis finalement n'y tenant plus, je les sortis et couvris la distance que j'avais pris soin de mettre entre nous le temps que je prenne la parole. Mes lèvres se posèrent brutalement sur les siennes mais ça ne dura que quelques secondes. La brutalité laissait place à la douceur, à ce besoin impérieux que j'avais d'elle. C'était physique oui, mais comme je venais de lui dire il y avait autre chose. J'attirais sa silhouette fine contre moi, me laissant griser par la chaleur de son corps contre le mien et par le baiser ardent que je lui donnais. Au bout d'un temps que je ne saurais estimé, je me décidais à quitter à regret ses lèvres. Mon front se posa contre le sien. Mes yeux se fermèrent brièvement, puis je les rouvris, plongeant mon regard dans le sien.

« Calmée ? »

Draw...
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeMar 21 Fév - 9:05

Sonny savait qu’elle venait de jouer gros, même si cela n’avait rien d’un jeu. C’était plus sérieux, plus profond, plus grave. Et c’était pour ça qu’elle avait craqué, qu’elle avait tiré le frein à main. Si cela n’avait été qu’un jeu, elle aurait cédé, elle aurait même couché avec lui sans regret, sans se poser plus de questions. Elle savait que quelque chose de plus la liait à Remington, et ce qui l’inquiétait c’est qu’elle ne savait pas du tout ce que c’était. Elle était capable de folie pour lui, alors qu’elle ne le connaissait que depuis… depuis quoi, à peine quelques minutes. Impossible de mettre un nom sur ce lien, et c’était cela qui l’avait fait fuir. Pas parce qu’elle ne voulait pas de lui, mais parce qu’elle le voulait trop et que cela ne lui ressemblait pas, mais alors pas du tout. Elle était du genre fleur bleue, elle avait besoin de pouvoir faire confiance à l’homme qui partageait son lit. Elle aimait les bains à deux, elle aimait se blottir dans le canapé, dans les bras de son homme. Bref, les choses classiques. Et même si elle ne connaissait pas Remington, elle se doutait bien que ce n’était pas le genre d’homme à agir ainsi. Et elle ne voulait pas se réveiller dans un grand lit froid…

Elle était prête à renoncer. Maintenant, temps que ça ne serait pas trop douloureux. Avant qu’elle s’attache trop. Sauf que non, contrairement à ce qu’elle croyait, Remington ne la laissa pas partir, il ne lui permit pas de fuir. Est-ce qu’elle se serait trompée sur lui ? Est-ce que lui aussi sentait cette force entre eux deux ? Ou est-ce qu’il allait lui rendre sa gifle ? Ce serait mérité en tout cas, à réaction puérile…

Mais non, il se planta devant elle et l’engueula. Il la traita de folle. De folle ? Non mais sérieusement ? Bah, oui, sérieusement, il fallait avouer qu’elle l’avait sacrement cherché. Mais ce qu’il dit ensuite n’alla pas en clarifiant la situation.

« Mais bizarrement, là je ne peux pas et je ne sais pas pourquoi. C'est physique oui. C'est sûr même qu'on va s'envoyer en l'air. Mais il y a autre chose d'inexplicable entre nous et je compte bien découvrir ce que c'est ! »

Alors lui aussi… Lui aussi sentait ce « truc » qui se passait, qui les liait, qui les attirait l’un à l’autre, corps et esprits. Il était aussi perdu qu’elle. Bon sang, deux paumés ensemble, ça risquait de faire des dégâts. Et il était étonnamment honnête. Il était aussi à la masse qu’elle et il ne le cachait pas. Et il ne lui mentait pas sur ses intentions. Rien n’énervait plus Sonny que les hommes qui faisaient le beau juste pour s’envoyer en l’air et qui changeaient totalement de personnalité après avoir obtenu ce qu’ils voulaient. Au moins, avec Remington, les choses étaient claires sur ce point. Et ne mentons pas, Sonny avait monstrueusement envie de lui. Mais il avait aussi conscience que quelque chose d’autre les tenait. Et que s’ils voulaient savoir ce que c’était, ils devraient aller au bout de cette histoire de fous.

Sonny ne regardait que lui et elle ne comprit pas immédiatement pourquoi il lui avait pris la main et pourquoi il l’attirait dans un recoin. Ah oui, les gens, les regards. Ils n’étaient pas seuls et leur petite scène n’était pas passée inaperçue. Elle s’en fichait, qu’ils aillent tous se faire voir, ce n’était pas eux qui étaient aux prises avec un sentiment qui les transformait radicalement.

Dès qu’ils furent un peu plus seuls, Remington la lâcha et s’écarta d’elle. Non, ça n’allait pas ça, parce qu’elle supportait de moins en moins d’être séparée de lui, même après un bref contact. Ce n’était pas bon ça, trop accro, le sevrage serait difficile. Et là, planté devant elle, Remington se lança dans une tirade comme elle l’avait fait peu avant. Et il répondit, en criant presque, à certaines des questions qu’elle se posait. Tout alla très vite. Successions d’images mentales. L’Irak, la guerre, les tortures, soldat. Il devait être militaire. Ou avait dû l’être dans une autre vie. Un don. Transformation en lynx. Pardon ? Oui, en fait. Cela expliquerait certaines choses. Son regard perçant. Sa force. Ce côté sauvage. Sonny le crut immédiatement. Pas besoin de preuve, pas là-dessus. Cela expliquait aussi pourquoi il n’avait pas été plus choqué que cela que quelqu’un puisse pénétrer ses rêves ; il connaissait cette réalité, le fait d’être différent. Au moins, quelle que soit leur relation, elle ne serait pas freinée ou gênée par cette donnée. Au contraire. Chacun se doutait de ce que devait ressentir l’autre, la différence, la nécessité de se contrôler, les inconvénients liés à ce gène… Autre image : la mort, le souvenir. Alors il n’était pas complètement fou ou complètement cruel, s’il l’avait obligée à tirer, c’était en grande partie pour elle, pour se souvenir d’elle.

Voilà, il aurait pu s’arrêter là, il avait gagné. En fait, il avait gagné dès son « on t’a déjà dit que tu étais légèrement cinglée ». Parce que si pour des gens normaux cela sonnait comme une insulte, il l’avait en réalité bien cernée. Oui, elle était cinglée. Et oui, il le lui avait dit. Non, ça ne l’avait pas arrêté. Et rien que là, il avait gagné.

Mais il l’acheva en fondant sur elle. Un baiser violent, presque douloureux, puis de plus en plus tendre. S’il ne l’avait pas tenu aussi enlacée, Sonny en aurait été soufflée et ses jambes l’auraient sûrement lâchée. Voilà, ça, c’était un baiser de cinéma, un de ceux qui vous scient sur place. Et encore cette chaleur, encore cette douleur dans le bas du ventre. Sonny se hissa de nouveau sur la pointe de ses pieds et passa ses bras autour du cou de Remington, s’agrippant à lui comme à une bouée de sauvetage. Elle ressentait tout, tout son corps était électrisé. Elle sentait sa poitrine contre le torse de Remington, ses mains fortes sur elle, la retenant prisonnière, son souffle se mêlant au sien. Oubliés les doutes, oubliée la peur, oubliée sa réaction débile, oublié le lieu public… si dans cinq secondes il ne la lâchait pas, elle ne répondrait plus de rien. Jeu, set et match.

Comme s’il l’avait senti, ou pour s’obliger à garder le contrôle, Remington mit fin à ce baiser mais ne rompit pas le contact pour autant. Mille mercis, soupira Sonny intérieurement. Elle n’aurait pas supporté qu’il la lâche complètement après ça. Elle sentit son front contre le sien, sa bouche à quelques millimètres de la sienne, et elle essayait de reprendre son souffle. Rien que cela, le sentir si près lui faisait du bien. Et d’ailleurs, elle non plus ne l’avait pas lâché. Il était loin de l’image du prince charmant, loin d’être parfait, mais elle non plus. Il était juste arrivé au bon moment. Puis elle ouvrit les yeux, noyant son regard dans celui de Remington. Elle s’y perdrait, c’était presque sûr, mais cela n’avait aucune importance.

« Calmée ? »

Sonny ne put réprimer un petit rire nerveux. Oui, ça pour le coup, elle était calmée. C’était l’électrochoc le plus efficace qu’il aurait pu trouver. Elle sentit naître un sourire sur ses lèvres. Non, il ne la lâcherait pas. Non, elle ne le lâcherait pas. L’une de ses mains quitta le cou de Remington pour glisser sur son torse. Elle en devinait les muscles et les cicatrices, les traces d’un passé qu’elle ne pouvait pas comprendre, et qu’elle ne prétendrait jamais comprendre, elle ne lui ferait pas cette offense. Ils en parleraient peut-être, un jour, si le besoin s’en faisait sentir. Elle, elle ne pouvait pas savoir ce que cela faisait d’être torturée, mais elle savait ce qu’on éprouvait à voir mourir ses amis. Et cela, il devait l’avoir vécu. Oui, peut-être en parleraient-ils. De leurs souffrances respectives, un jour.

Deux paumés, oui, c’était ce qu’ils étaient. Deux paumés. Eh bien merde pour tous ceux qui détiennent la boussole de la vie.

Bon et maintenant ? Que faire après ça ? Parler ou … ? Oh, le « ou… » était bien plus attractif et séduisant mais tout de même, pas ici… Remarquez, ce n’était pas non plus le lieu adéquat pour parler des choses importantes, des choses qui ne doivent pas tomber dans n’importe quelle oreille. Elle avait envie de connaître la suite de son histoire et de découvrir le reste de son corps, et en même temps, elle n’avait pas envie de bouger, elle ne voulait pas merder à nouveau, elle ne voulait pas que ça s’arrête. Oh et puis trop de questions. Elle le suivrait, quoi qu’il décide. Elle le savait. Il avait gagné et elle aussi. Match nul. Mais un bon, très bon match nul.

Alors, sans bouger, en le regardant toujours dans les yeux, le sourire rieur aux lèvres, elle lui murmura :

« Je vois que tu n’avais pas menti, tu ne m’en veux vraiment pas pour la balle entre les deux yeux, ni pour la baffe apparemment. Et tu cours après une cinglée… Aurais-tu des tendances masochistes ? »

Service, Remington… Begin a new game…



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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeJeu 23 Fév - 21:08



Life's too short to even care at all. I'm losing my mind, losing my mind, losing control. Pourtant il ne fallait pas que je perde le contrôle même si le moindre contact avec Sonny menaçait de me faire chavirer. Ses lèvres sur les miennes, son corps chaud contre le mien. Cette poitrine collée contre mon torse que je sentais malgré la barrière que nos vêtements représentaient. J'étais tiraillé entre l'envie que j'avais d'elle et le fait que nous devions parler. Fallait-il vraiment que nous parlions d'ailleurs ? Il semblait que oui car elle ne souhaitait pas qu'on couche et qu'on se dise au revoir aussitôt après. Je ne le désirai pas non plus mais parler de moi n'était pas un de mes points forts. Il n'y avait pas grand chose à dire de toute façon. Je devais taire beaucoup de choses sinon elle sortirait de ma vie encore plus vite qu'elle n'y était entrée. Et je voulais qu'elle y reste. Qu'on s'entende bien, je ne parle pas de rester avec moi toute notre vie, je me flinguerai avant de penser une telle chose. Mais rester avec moi pour le restant de la journée. Demain également. Et ensuite, je ne savais pas. Je verrai si elle était aussi spéciale que je le supposais et si elle dérogeait à ma règle de trois jours maximum avec une femme. Était-elle capable d'accomplir ce miracle, c'était fort possible. Et si elle y arrivait, je savais d'avance ce que je devrais faire sans savoir quel jour, ni à quel moment je le ferai. J'aurais bien le temps d'y penser, pour l'instant, il fallait simplement que je me concentre sur l'instant présent, sur cette main qui glissait sur mon torse.

Je ne l'avais pas lâché et la tenais toujours dans mes bras. Mon front reposait contre le sien, nos lèvres n'étaient qu'à quelques centimètres et j'avais envie de l'embrasser de nouveau. Dans ce lieu public, sans me soucier des regards des passants qui trouveraient notre comportement indécent. Même si je nous avais entraînés un peu à l'écart, il n'y avait rien de normal dans tout ce que nous venions de faire. Deux inconnus qui se réveillent d'une sieste et se courent après à côté d'une fontaine. Un baiser à en perdre la raison. Une claque. De nouveau un baiser à en perdre la raison. A y regarder d'un oeil extérieur, on devait penser que nous étions tous les deux bons à être enfermés dans un asile. L'idée ne me déplaisait pas. On y était logé, nourri, et on avait même droit à des pilules qui nous faisaient planer mais qui étaient soit disant pour notre bien. Il y avait également les séances de thérapie de groupe durant lesquelles on pouvait s'amuser à torturer mentalement les autres pensionnaires. Les séances avec un psychologue qui pouvaient s'avérer amusante, surtout quand on partait dans un délire monumental pour créer cette lueur chez le psy. Celle où il nous prenait vraiment pour un dingue. Je ne parlais pas en connaissance de cause pour l'asile, j'avais juste vu quelques films sur le sujet. Alors que l'on m'enferme ne me déranger pas plus que cela. Et si c'était avec Sonny, encore moins.

Je ne disais plus rien, me contentant de garder mon regard plongé dans le sien. Je n'attendais rien, nous n'étions pas obligés de parler. Le silence était un moment qui me plaisait beaucoup et il évitait que l'on parle pour ne rien dire. Cela aurait pu durer quelques minutes sans que ça me gêne. Mais quand je vis un sourire étirer ses lèvres, je sus qu'elle allait prendre la parole. Je détournais le regard, observant ma main qui remontait le long de son bras, la caressant. Je pris ensuite une de ses mèches de cheveux, glissant mes doigts à travers. Un sourire naquit sur mes lèvres. On ne pouvait pas dire que j'appartenais à la gamme des imbéciles heureux qui souriaient pour un rien, bien au contraire. Les vrais sourires étaient rares chez moi et quand j'en esquissais, ils étaient soit moqueurs, soit cyniques. Mais là, pour une fois j'eus un vrai sourire provoqué par ce qu'elle venait de me murmurer.

« Je note que sur tout ce que j'ai dit, ce qui t'intéresse, ce sont mes tendances masochistes.  J'en ai effectivement, je ne le nie pas. Une cinglée et un masochiste ensemble, c'est pas mal comme mélange je trouve. »

Et si je n'avais que des tendances masochistes, cela pourrait être assez simple. Mais je pouvais rajouter au masochisme, un côté dingue, un autre tueur. Une obsession non pas psychopathe mais fétichiste pour les foies humains. J'étais somme toute un être humain presque normal parmi la cruauté qui caractérisait ce monde. Je n'étais pas pire que les pédophiles et pas mieux que les riches qui appauvrissaient davantage les pauvres et qui les regardaient mourir du haut de leur tour de verre. Et puis, je ne faisais pas mes méfaits sans raison. Il y avait toujours un contrat avec de l'argent à la clé. Même si je prenais du plaisir à exercer cette passion, je ne le faisais pas par plaisir pur, mais pour l'argent à la base. La différence dans la nuance était très mince, moi-même je ne la distinguais pas toujours. Sonny ferait-elle la différence le jour où elle apprendrait tout ça ? Si elle le découvrait un jour ?

« Et pendant qu'on y est sur mes tendances, le mensonge n'est pas dans mes habitudes même si j'omets certaines choses. »

Comme tout ce qui concernait l'Agence qui faisait parti de ma vie parallèle. Officiellement, je n'étais qu'un ancien militaire traumatisé et raté qui vivait de petits boulots pour survivre. J'avais une passion pour la bande dessinée et j'avais pour projet de faire un jour paraître la mienne. Tout ça, c'était la version officielle qui était bien réelle même si je ne me considérais pas comme un râté. Omettre la vérité sur la version officieuse, ce n'était pas un mensonge à mes yeux. Seulement un moyen de me protéger et d'éviter d'avoir à éliminer des personnes qui deviendrait trop gênante pour moi. Tuer ne me dérangeait pas, tomber aux mains des autorités, oui. On pouvait dire que mes priorités étaient bizarres mais c'était moi.

Par contre une chose qui n'était pas vraiment moi, ce fut de lâcher la mèche de cheveux de Sonny pour laisser tomber ma main, prenant la sienne au passage. Un geste de tendresse ? Possible, probable, voir certain. Être un tueur à gage, un ancien militaire et un ancien torturé ne supprimait pas le droit d'avoir des élans de tendresse, si ? Cela prouvait que je n'étais pas un simple robot et que je pouvais éprouver des choses même si c'était rare. Et puis peut être que ça m'éviterait de rester fixé sur les pulsions que j'avais. Il n'y en avait qu'une en fait : coucher avec elle. Mais bon ça elle le savait et le désirait tout autant que moi. Il fallait pourtant voir au delà, ne pas disparaître et gagner ou perdre tous les deux comme elle avait dit. C'était donc ce que je faisais. Le pire, c'était que je me rendais compte sur le moment, que ça ne me dérangeait pas. Il fallait que je repère très vite un arbre avec une branche suffisamment solide pour m'y pendre. Chose que je ne fis pas et à la place je sortis cette phrase horrible :

« Une glace ? Une boisson ? Les rêves de ce genre plutôt que mes cauchemars habituels, ça creuse. »

Et voilà comment inviter une femme à manger et boire à un stand qui se trouvait non loin de l'entrée du parc, version Remington. On notera toute l'expérience en la matière... Ou pas.
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeVen 24 Fév - 20:55

La main de Remington glissa le long de son bras, comme une lente torture, puis il joua avec l’une de ses mèches, avant de sourire de ses propos. Voilà, enfin, toute la pression entre eux venait de tomber. Plus d’énervement, plus de colère, plus de pulsions, juste un bien-être. Et cela ne pouvait pas leur faire de mal. S’ils arrivaient à plaisanter de cette situation qui n’avait rien de normal, alors les choses pouvaient tourner différemment. Un maso et une cinglée… oui, c’était plutôt bien résumé. Et Sonny ne savait absolument pas combien de temps un mélange aussi détonant tiendrait avant d’exploser, mais elle s’en fichait éperdument. Aussi étonnant que ce soit, elle se ficha même de son aveu : il ne lui dirait pas tout. Sonny était d’une curiosité maladive. Il suffisait qu’on ne veuille pas lui dire quelque chose pour qu’elle en devienne obsédée et mette tout en œuvre pour le découvrir. Remington, honnête jusque dans le mensonge. Etrange, mais pour l’heure, elle se moquait de ne pas tout savoir de lui. Elle-même ignorait jusqu’où elle irait dans ses révélations. Et puis, s’il y avait bien quelqu’un qui avait des secrets, c’était bien elle, qui avait en France une tombe à son nom…

Quand il lui prit la main, elle se sentit plongée quelques années en arrière, lorsque pour la première fois un garçon qui lui plaisait lui avait touché la main et l’avait embrassée sur la joue. Elle se souvenait qu’à l’époque, on pouvait se satisfaire de cela. Bon, soyons honnête, avec Remington, cela ne lui suffirait absolument pas, mais elle se sentit toute en émoi à ce seul contact. Qu’il lui prenne comme ça la main, dans un lieu public, elle trouvait presque cela encore plus osé que l’étrange spectacle de gifles et de baisers qu’ils avaient donné aux promeneurs. Parce que c’était tendre et réfléchi. Parce que consciemment ou non, cela les engageait réellement pour autre chose qu’une partie de jambes en l’air. Cela n’ouvrait pas la porte à une grande et belle histoire à l’eau de rose comme dans les films, ça non, mais à quelque chose d’autre. Parce que d’une façon ou d’une autre, Remington était entré dans sa vie et en ferait partie, le tout était, pour combien de temps et dans quelle mesure.

Avait-elle bien entendu ce qu’il lui proposait ? Aller manger une glace ou boire un coup ? Sonny se surprit à rire intérieurement. Pour lui plaire ou la faire taire ce n’était pas bien compliqué : lui offrir à manger (et les glaces et le pop-corn occupaient le top five des choses auxquelles elle ne pouvait résister, heureusement qu’elle aimait courir…), un caramel-macchiato ou l’embrasser. Une glace ce serait parfait par ce temps et après tous ces coups de chaud, alors elle acquiesça et ils reprirent tous deux, main dans la main, comme si c’était normal, les chemins prévus à cet effet.

Sonny remarqua alors un couple de vieilles dames, assises sur un banc, qui les fixaient d’un œil visiblement désapprobateur tout en échangeant sans aucune discrétion des commentaires. Alors Sonny les regarda, se rapprocha un peu plus de Remington, sans savoir s’il remarquait ou non son manège, de sorte que son bras et sa hanche soient totalement collés aux siens et fit un signe aux deux commères. Un signe qui leur disait « eh ouais, on est ensemble ». Peut-être un bien grand mot, « ensemble », mais cela eut son petit effet car les deux femmes prirent un air encore plus choqué. Et cela la fit rire. Qu’elles soient choquées par leur comportement, par leur différence d’âge ou par on sait quelle autre raison, elle avait dépassé tout cela. Lui seul avait su la rendre vivante, c’était tout ce qui comptait.

Ils marchèrent comme ça, en silence pendant un moment. Ecoutant le bruit de leurs pas sur le gravier, les cris des enfants, observant les promeneurs qui leur rendaient leurs regards. Profitant de leurs paumes jointes. Peut-être auraient-ils pu rester comme ça encore longtemps, mais Sonny était une bavarde compulsive et ça, il faudrait bien qu’il s’y fasse.

« Tu sais, je n’ai pas retenu que ton côté maso. Je l’ai bien noté, certes, mais j’ai entendu ce que tu m’as dit. Si je n’en ai pas parlé, c’est juste que… je ne sais pas ce que ça fait que d’aller à la guerre, de tuer des hommes comme ça, pour de vrai. Je n’ai pas la moindre idée de ce qu’on ressent, ni même pour les tortures que tu as subies. Je ne peux pas même pas comprendre le dixième de ce que tu as connu. Moi la seule fois où j’ai vécu une expérience qui aurait pu ressembler à ça, j’ai fui à toute jambes et j’ai laissé les autres mour… »

Stop. Il fallait cesser le flot de paroles avant de trop en dire. Il n’avait peut-être pas envie de connaître sa vie et peut-être qu’elle allait réussir à déjà le lasser. Et puis, était-elle prête à en parler à un inconnu, même s’il était bien l’une des rares personnes qui pouvaient savoir ce qu’elle ressentait ? Elle avait serré un peu plus fort la main de Remington, elle s’en rendait compte à présent, alors elle relâcha ses nerfs et tenta de faire comme si de rien n’était.

« Enfin bref, si je n’ai pas relevé ce que tu m’as dit tout à l’heure, c’est pour ça. J’ai horreur des gens qui te regardent avec un air de chien battu et qui te disent qu’ils comprennent, qu’ils compatissent, qu’ils savent ce que tu éprouves, alors que c’est archi faux. On ne peux pas le comprendre avant de l’avoir vécu, pas vrai ? Je voulais juste en savoir un peu plus pour ne pas faire n’importe quoi, pour ne pas dire n’importe quoi. Réveillée, ou si tu as besoin que je calme tes rêves une fois de temps en temps. Maintenant, si tu as envie que je te mente, que je te dise que je comprends, bla bla bla, si tu as envie qu’on fasse semblant, je peux le faire. Tu n’es pas le seul à négocier avec la vérité tu sais. »

Et tout était sincère. Bizarre de pouvoir être honnête à ce point. Risqué aussi. Ils n’avaient pas cessé de marcher pendant qu’elle faisait son laïus et elle le regardait pour lui faire comprendre qu’elle disait vrai. Elle ne voulait pas être intrusive, elle ne voulait pas non plus l’obliger à écouter son histoire. Et d’ailleurs, à côtés des souffrances de Remington, elle trouvait les siennes bien maigres, et elle fut presque honteuse d’en être autant affectée. On ne l’avait jamais torturée, on ne l’avait jamais envoyée au front, entre les bombes, elle n’avait pas le droit de dire qu’on avait anéanti sa vie. Elle se mordit la lèvre et son regard s’assombrit, puis elle vit d’où pourrait provenir son salut.

Le stand de glace, enfin, à l’horizon. Elle s’était bien trompée sur cet homme. Elle ne l’aurait jamais cru du genre à se promener main dans la main dans un parc, manger une glace, bref, faire toutes les petites choses qui font une relation. Arrêter de juger les gens sans les connaître, voilà ce qu’il fallait que Sonny ajoute à sa liste des choses à faire.

« Tu en prends une avec moi ou je serai la seule à passer pour une gourmande ? Je meurs d’envie de… han, trop de choix, les glaces et moi c’est une grande histoire d’amour. Restons fidèle à la fraise. Quel parfum pour toi ? »

Une autre question, qui n’avait strictement rien à voir, lui traversa l’esprit lorsqu’elle vit passer près d’eux un chat qui courait à toute vitesse. Il n’y avait aucune logique dans son cerveau, alors elle ne put s’empêcher de murmurer à l’oreille de Remington :

« Quand tu te transformes, je veux dire, de lynx à humain… tu te retrouves nu ? Parce que ça m’intéresse aussi… »
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeDim 26 Fév - 8:32

Aussi loin que remontaient mes souvenirs je crois bien que c'était la première fois que je tenais la main à quelqu'un. Durant mon enfance, le solitaire que j'étais voulait se débrouiller par lui-même, je m'éloignais à chaque fois qu'un de mes parents adoptifs souhaitait me tenir pour m'aider. Tomber seul plutôt que rester stable avec l'aide d'une personne. Faire mes propres découvertes sans rien devoir à personne. En réalité, il n'y eut qu'une seule personne que j'avais pris par la main. Elle avait de longs cheveux bruns, des yeux verts, huit ans de moins que moi et elle s'appelait microbe Jay, un joli petit surnom affectif que je lui avais trouvé à l'époque. Elle avait eu une période durant laquelle elle ne me lâchait pas, voulait faire tout ce que je faisais ou au moins regarder. Quand on sortait, il fallait absolument qu'elle me tienne la main et si j'avais le malheur d'accepter d'aller la chercher à l'école, c'était pire. Je n'étais pas à l'aise et il y avait de quoi quand plusieurs paires d'yeux de gamines de six ans étaient braqués sur moi. Je ne me souvenais plus si j'avais détesté cette période de ma vie. Il ne me semblait pas mais elle me paraissait très lointaine et révolue.

A présent c'était la main de Sonny que je tenais dans la mienne. Nous avancions silencieusement le long des sentiers gravillonnés du parc. Je sentais la chaleur de la paume de sa main contre la mienne. Ce n'était pourtant pas ceci qui attirait mon attention. Mes yeux passaient rapidement d'une personne à l'autre, à chaque fois que nous en croisions une. Ils étaient également attirer par les gens assis dans l'herbe ou sur les bancs et qui profitaient du soleil. C'était plus fort que moi, j'analysais chaque mouvement qui était fait, chaque syllabe prononcée que je n'entendais pas mais que je distinguais parfois en arrivant à lire sur les lèvres. Il n'y avait pourtant aucun risque mais mon cerveau faisait son travail. Malformation professionnelle. Et gros défaut. Car qu'est-ce qu'un gamin jouant avec cerf volant pouvait bien représenter comme danger ? A moins que son cerf volant soit relié à une bombe mais quelle utilité en étant dans les airs ?

Ce n'était pas encore gagné avant que mon cerveau ne se mette en mode pause et que j'arrête d'analyser tout ce qui se passait autour de moi. Il fallait que quelque chose attire mon attention, suffisamment pour que je détourne le regard. Et c'est ce qui se produisit quand je sentis le dos de la main de Sonny effleurer ma hanche. Mon regard se baissa et je vis qu'elle s'était rapprochée de moi, collant nos hanches et nos bras. Une raison particulière à cela ? Je cherchais son regard mais ne le rencontra pas. Je la vis faire un signe et mes prunelles se braquèrent en direction des destinataires de ce signe. Deux vieilles dames assises sur un banc et qui parurent choquées par ce qu'elle venait de faire. J'esquissais un sourire. Elle n'avait pas froid aux yeux et ne craignait pas les qu'en dira-t-on. Je ne dis rien sur ce qu'il venait de se passer, ce n'était pas important. Ce qu'on pensait de moi, je m'en fichais un peu. Je ne vivais pas pour plaire aux autres, loin de là. C'était quelque chose que j'avais compris depuis bien longtemps.

Nous poursuivîmes notre promenade en silence jusqu'au stand de glaces et boissons. Il n'était pas encore en vue même si on se rapprochait de l'entrée du parc. J'appréciais ce silence entre nous. Il n'y avait pas de conversation inutile au moins. Je sentis une pression plus fort sur ma main. Aussitôt je quittais le sentier du regard alors qu'elle prenait la parole. Elle abordait le sujet de la guerre et des tortures que j'avais subies. Ainsi, elle avait entendu quand j'avais évoqué cette période de ma vie, ce n'était pas passé au travers. Je lui sus gré de reconnaître qu'elle ne comprenait pas ce que j'avais vécu. Je n'aurais pas aimé entendre sortir de sa bouche qu'elle comprenait, de voir ce regard compatissant et plein de pitié. Je l'écoutais attentivement, et encore davantage sur ses dernières phrases. Elle avait vécu une expérience qui aurait pu ressembler à la mienne ? Elle s'interrompit mais je commençais à comprendre quand elle m'avait dit que ses rêves étaient une vraie torture dans le genre. Elle avait sûrement eu son lot de souffrance.

« Fuir pour sauver sa propre vie est une réaction normale. Si tu culpabilises pour ça c'est une erreur car les personnes capable de donner sa vie pour sauver une autre dans l'entourage se comptent sur les doigts d'une main. Et encore souvent il n'y en a aucune. »

Je répondis simplement ces quelques mots. J'en revenais à l'homme qui était prêt à tout pour survivre, aussi bien à tuer qu'à laisser les autres périr. Une réaction normale était dictée par la survie. Une réaction de dingue faisait que l'on était prêt à flirter avec la mort. J'avais tendance à me situer dans la deuxième catégorie de réactions, non pas pour sauver des gens mais pour atteindre mes objectifs. Avoir de nouvelles cicatrices n'était pas dérangeant si la mission était accomplie. La survie et l'entraide, c'était un peu des discours qui m'étaient passés au dessus durant ma période militaire.

La pression de la main se détendit un peu, je le sentis mais ne dis rien car elle reprenait déjà la parole. Ce fut un long flot de mots qui sortirent. Mais pourquoi parlait-elle autant d'un coup ? Et pourquoi surtout se sentait-elle le besoin de se justifier sur une chose qu'elle n'avait pas fait. Si j'avais voulu qu'elle relève et ait pitié de moi, je lui aurais fait comprendre depuis quelques minutes déjà. Et voilà à présent qu'elle me disait qu'elle pouvait faire semblant de comprendre ce que j'avais vécu. Horreur, si elle le faisait, j'allais disparaître dans les secondes qui allaient suivre. Le silence finit par retomber alors que je voyais se profiler le stand. Nous étions presque arrivés mais il y avait encore un peu de temps. Il fallait sans doute que je réponde mais que dire ? Je n'étais pas un grand bavard et faire des discours très longs pour ne rien dire, ce n'était vraiment pas mon truc. Voilà une chose qu'elle découvrirait très vite en ce qui me concernait. J'allais à l'essentiel, quitte à ce que mes propos soient interprétés comme une sorte de je m'en foutisme.

« Reste toi-même et ne me dis pas que tu comprends si ce n'est pas le cas. Je ne supporte pas de voir la compassion dans un regard. La pitié encore moins. Et pour ce qui est d'apaiser mes rêves de temps en temps, on verra. Pourquoi pas. »

Comment ça, pourquoi pas ? Mais non, pourquoi j'acceptais déjà à demi mot sa proposition de m'aider à dormir mieux ! Je manquais énormément de sommeil certes, mais de là à m'abaisser pour accepter l'aide d'une femme qui m'était encore inconnue quelques minutes auparavant. Elle venait de franchir une barrière, une première parmi les nombreuses que j'avais érigé autour de moi. Il ne fallait pas qu'elle en franchisse une seconde sinon mon système de sécurité allait être mis en péril.

Mon salut arriva, enfin le stand. On s'arrêta à quelques mètres de lui, le temps de laisser les quelques personnes devant nous commander et partir. Le temps également de faire notre choix. Je ne savais pas ce que j'allais prendre. Je posais mon regard sur le grand panneau avec les choix des produits sans être convaincu par ce que j'allais choisir. Elle me demandait si j'allais prendre une glace. Je n'en raffolais pas particulièrement. Ses yeux s'animaient en parlant de glace. Elle mourrait d'envie de ? Prendre plusieurs parfums ? Mon esprit était beaucoup moins innocent que le sien sur l'instant car je mourrais d'envie également mais ça n'avait rien à voir avec une glace. A part si on l'étalait sur son corps. Arf, mon esprit divaguait mais je n'en allais pas m'en blâmer. Mon regard s'attarda un instant sur les boissons qui étaient proposées. Des sodas sous plusieurs déclinaisons, avec sucre, sans sucre, à la cerise, au citron et j'en passais. Même de la bière. Dans un parc, pourquoi pas après tout. Finalement je fis mon choix pour le breuvage que je buvais le plus souvent.

« Jus d'orange. »

Je n'étais pas fan des glaces, elle allait en être pour ses frais et passer pour la seule gourmande. C'était presque notre tour. Il n'y avait plus que deux personnes avant nous, un père avec son fils. Je les regardais sans vraiment les voir quand je sentis le souffle de Sonny sur mon oreille. Je ne m'attendais pas à la question qu'elle me posa et j'eus un froncement de sourcils en retour. Il fallait le temps que ça m'arrive au cerveau. Une fois que ce fut fait, je lâchais sa main, me mettant à rire. Et dire que je trouvais que j'avais l'esprit mal placé quelques secondes avant. Je n'étais pas le seul apparemment. Je passais ma main autour de son épaule et l'attirais contre moi, penchant la tête pour répondre à sa question dans un murmure. Il y avait trop d'oreilles indiscrètes autour de nous pour que je parle normalement.

« Pas tout à fait... Il me reste quelques lambeaux de vêtements. Je parie que tu es déçue de cette réponse avec ton esprit mal tourné. De toute façon, j'évite de me transformer, la douleur est horrible. »

Ce qui était vrai. C'était pire que les tortures que j'avais subi à mes yeux. J'avais l'impression qu'on m'arrachait complètement la peau, mettant ma chair à vif. Je pouvais apprendre à supporter cette douleur avec de l'entraînement. L'inconvénient c'était mon passage de lynx à humain. Je perdais connaissance et j'étais un peu déboussolé ensuite. Il n'y avait rien de pire pour moi, être dans une telle situation de faiblesse en étant à la merci d'autrui. Je tus ce point faible, elle n'avait pas besoin de le savoir car il n'appartenait qu'à moi. Le père et le fils partirent avec leur commande et ce fut enfin notre tour. Gardant ma main autour de son épaule, je nous fîmes avancer et passais la commande.

« Une glace à la fraise pour la demoiselle. Et un jus d'orange s'il vous plait. »
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Sonny Malone

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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeDim 26 Fév - 12:58

Si elle parlait beaucoup, c’était visiblement loin d’être le cas de Remington. Du moment qu’il la laissait parler, après tout. Rien ne l’empêchait de ne pas l’écouter et de penser à autre chose. Même si elle s’en rendait compte, ça ne serait pas grave. Elle, elle était du genre à penser à voix haute, ce qui lui jouait des tours parfois. Mais c’était ça, ou devenir plus folle qu’elle ne l’était déjà.

Il n’était pas curieux non plus apparemment, car il ne lui posa pas la moindre question sur son passé. Il ne chercha pas à savoir ce qui s’était passé pour qu’elle ressente la nécessité de fuir. Qu’aurait-elle pu dire de toute façon ? Son histoire, face à la sienne, ne pesait pas grand-chose. Mais quelque part, les quelques mots qu’il prononça, qu’ils soient sincères ou non, lui firent beaucoup de bien. Personne, depuis l’incendie, ne lui avait dit de ne pas culpabiliser. Personne ne lui avait dit que sa réaction avait été normale. Elle vivait avec cette honte depuis des mois. Et cet homme qu’elle ne connaissait pas venait en quelque sorte de lui pardonner. C’était idiot, songea Sonny, d’accorder tant d’importance à ce qu’il pensait d’elle. Idiot de s’en remettre à lui.

Mais il ne la lâchait pas et se moquait qu’elle ne puisse pas comprendre ce qu’il avait enduré. Pas de faux-semblants ? Ok, Sonny pouvait être honnête et mentir indifféremment. Elle l’avait appris. Elle n’aimait pas feindre des sentiments, surtout ceux aussi fort que la compassion ou la compréhension, mais s’il le lui avait demandé, elle l’aurait fait. Il préférait ne pas en parler, soit, elle n’en parlerait pas. Il voulait qu’elle reste elle-même ? Bavarde et chieuse comme elle l’était ? Admettons, pour l’instant, il ignorait ça d’elle, il le découvrirait bien assez tôt.

Pour l’heure, patientant au stand, son cerveau ne s’inquiétait pas de l’après. De ce qui se passerait après cette étrange journée. D’habitude, elle prévoyait toujours tout à l’avance. Tout était organisé dans sa vie, le hasard n’y avait que peu, très peu de place. Mais là, elle vivait dans le présent, ici et maintenant. Pensant à la glace, à la main de Remington dans la sienne, à Remington nu, après s’être transformé. Cela faisait un mélange détonant dans son esprit.

Alerte rouge. Il lui lâcha la main, éclata de rire et enroula son bras autour de ses épaules. Ce rire… Sonny remarqua que c’était la première fois qu’elle l’entendait. Elle savait aussi que cela ne se reproduirait pas de sitôt. Mais elle le prit comme une petite victoire. Elle l’avait fait rire, après son flot de parole. Elle l’avait fait rire. Et ce qu’il lui répondit à l’oreille, comme deux complices qui craignaient d’être pris sur le fait, l’amusa tout autant… Du moins la première partie, quand il la traita d’esprit pervers. Elle l’avait cherché, en même temps. Par contre, la suite lui plut moins. Une transformation douloureuse. Jamais il n’aurait donc la paix ? Irait-il donc toujours de souffrance en souffrance ? Les capacités semblaient toujours avoir un revers de la médaille. Elle-même s’épuisait à entrer dans les rêves. Même si elle dormait pendant dix heures, si elle entrait dans l’inconscient d’un autre, c’était réduit à néant. D’où son état de fatigue permanent. Mais outre cela, elle n’avait pas mal. Ça n’était certainement pas ce qu’il avait voulu en lui avouant cela, mais Sonny se promit de sacrifier quelques-unes de ses précieuses heures de sommeil pour l’aider. Pour au moins limiter les souffrances mentales de ses cauchemars. Du moment qu’il ne quittait pas la ville, elle serait capable de le retrouver dans le monde des rêves. Elle le reconnaîtrait sans le moindre problème.

Avait-il conscience qu’il n’avait pas enlevé son bras de ses épaules ? Avait-il conscience qu’elle mourait d’envie de passer son bras autour de sa taille, là comme ça ? Elle aurait très sérieusement envisagé de le faire s’il n’avait pas commis un sacrilège.

Quoi ? Un jus d’orange ? Pas de glace ? Non, ça, ça n’était pas possible. Elle se jura de remédier à ce vilain défaut. Oui, aussi dingue que cela puisse paraître, cela la choqua plus que la guerre, la transformation en lynx ou tout le reste. Les glaces, sérieusement…

Le vendeur les servit et Sonny proposa à Remington de s’assoir. Ils étaient côte à côte maintenant. Son esprit vagabondait. Le silence allait s’installer entre eux, elle le sentait. Pourquoi pas, après tout, elle n’avait plus envie de parler (chose assez rare pour être souligné). Elle le regarda boire son jus d’orange – trop acide pour elle, trop de pulpe, non vraiment, le jus d’orange, non – et se surprit à vouloir être ce gobelet sur lequel il posait ses lèvres. Tant pis si elle devait être recouverte de jus d’orange pour ça. Elle serait même prête à se laver au jus d’orange, si ça pouvait le convaincre de… Oui, non, Sonny se rappela qu’elle se trouvait tout de même dans un lieu public, alors elle porta ses lèvres sur sa glace et le contact froid calma quelque peu ses ardeurs. Enfin, pas pour longtemps.

Il trouvait qu’elle était cinglée et qu’elle avait un esprit pervers, eh bien, il n’allait pas être déçu.

« J’ai été terriblement déçue que tu ne prennes pas de glace avec moi. Ça n’est pas normal de ne pas aimer ça, c’est la meilleure des thérapies. Et crois-moi, je vais te faire changer d’avis à leur sujet. »

Pour ponctuer ses propos, elle trempa ses lèvres dans le sorbet et se pencha pour embrasser Remington. Elle allait lui faire aimer la glace à la fraise, croix de bois, croix de fer. Après lui avoir imprimé un baiser fruité, elle plongea son index dans la glace et l’étala au creux de son cou.

« Au fond, je sais que tu aimes la glace. Le truc, c’est que tu ne l’as jamais mangée comme il faut. »

« A toi de jouer, Remington Pillsbury », songea-t-elle en espérant bien que sa technique pour manger la glace plairait à cet homme… Le froid contre sa peau, la chaleur qui l’habitait, il fallait vraiment qu’il se décide à mettre fin à son calvaire…
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MessageSujet: Re: Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]   Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé] Icon_minitimeDim 26 Fév - 15:59

Nos commandes passées, nous attendîmes en silence que le serveur nous les donne. Ce qu'il ne mit pas longtemps à faire. Mes prunelles se posèrent légèrement sceptiques sur la glace à la fraise qu'il donna à Sonny. Je pris mon gobelet et le regardais, le comparant rapidement à la glace. Le goût était peut être plus acide, largement moins bon que la glace. Mais l'avantage de la boisson, c'était qu'elle était rapide à boire. Tandis qu'une glace à manger, ça prendrait un temps monstre. Encore une fois, je résonnais en tueur à gage et ex militaire et non en homme normal profitant simplement de la vie. Mon cas était désespéré, je le savais depuis bien longtemps. Ôtant mon bras des épaules de Sonny, je sortis de la monnaie de la poche, payant nos achats. Puis je l'accompagnais en silence jusqu'à un coin d'herbe qui se trouvait près d'un arbre.

Nous nous installâmes dessus en silence, chacun préoccupé par ce qu'il tenait en main. Je bus une gorgée de jus d'orange ce qui me fit du bien et me désaltéra un peu. J'avais toujours aussi chaud en fait, aussi bien à cause de la chaleur ambiante et de ce corps qui se trouvait à proximité du mien. Je me tenais bien, respectant les termes du contrat qu'elle avait fixé. Je ne l'avais pas signé, je me contentais de le respecter comme si je voulais lui prouver quelque chose alors que je n'avais rien à lui prouver. Je ne devais rien à personne, seulement à moi-même. Et pourtant...

Ses lèvres qui se posèrent sur sa glace captivant mon attention. Dommage que je ne puisse pas remplacer la fraise. Dommage que je lui ai proposé une glace qui serait extrêmement longue à manger. Dommage pour tout en fait. Mes lèvres se posèrent une nouvelle fois sur le rebord du gobelet. Je bus une gorgée mais cette fois, je manquais m'étouffer en buvant. Je me demandais bien si j'avais bien entendu ce qu'elle venait de dire. Ce n'était pas le fait que ce n'était pas normal de ne pas raffoler de la glace qui avait manqué faillir m'étouffer, mais plutôt qu'elle m'annonce qu'elle allait me faire changer d'avis à ce sujet. J'eus à peine le temps de reprendre une respiration normale. Elle se penchait déjà sur moi pour m'embrasser. C'était divin. Si elle agissait ainsi à chaque fois, elle risquait d'arriver à me faire aimer beaucoup de choses. Dont la glace à la fraise.

Je ne regrettais pas le rêve et ce qui avait commencé à s'y passer. Ce que nous vivions là était meilleur, bien réel. Et surtout ça pouvait durer pour le restant de la journée, même s'il fallait pour cela freiner mes pulsions. J'agissais comme je ne l'avais pas fait depuis bien longtemps, depuis mon enfance en fait. Je me détendais, profitant d'un simple geste de la vie quotidienne même si tous les couples ne faisaient pas de telles choses. De toute manière, nous n'étions pas un couple non. Juste deux inconnus attirés physiquement l'un par l'autre avec un je ne sais quoi qui nous reliait également mentalement. Une attraction forte qui retomberait peut être quand nous l'aurions fait. Ce qui n'allait pas tarder à se produire si elle continuait à me mettre à aussi rude épreuve pour que je me maîtrise. C'était de plus en plus dur. J'avais de moins en moins envie de résister. Je ne la quittais pas du regard alors qu'elle s'étalait de la glace au creux de son cou. Je pensais être le pire des deux, mais c'était elle en fait. J'aurais du le soupçonner dès la violence du premier baiser qu'elle m'avait donné. Je ne menais pas autant le jeu que je voulais bien le croire. C'était plutôt moi qui me faisait mener par le bout du nez.

« Tu es une vraie perverse Sonny Malone... »

Elle le savait déjà bien évidemment. Ou si elle refusait de le croire, il fallait que je lui dévoile sa véritable nature qui me plaisait fortement. On n'allait pas s'ennuyer, si j'avais encore un doute à ce sujet, il venait de s'envoler avec le baiser à la fraise et la glace sur son cou. Je me rapprochais d'elle. A mon tour, je me penchais pour déposer mes lèvres sur sa peau. Ma bouche descendit lentement, ma langue s'occupant de faire disparaître toute trace de glace. Ce geste m'électrisa. Ma main lâcha le gobelet que je tenais. Il répandit le restant de son contenu dans l'herbe. Au diable le jus d'orange et la glace. Je ne pouvais plus rester sage et respecter les règles du jeu quand elle agissait ainsi. Si elle cherchait à me faire plier et céder le premier, c'était chose faite. Quand j'eus fini de faire disparaître toute la glace qui se trouvait sur sa peau, ma bouche remonta pour se poser sur la sienne. Ce n'était pas un baiser léger et anodin. Il exprimait l'envie que je ressentais pour elle et que je ne pouvais plus contenir.

« Tu me fais vivre un calvaire et je n'en peux plus... Tu as gagné. »

Oui, je n'en pouvais plus d'attendre. Nous étions dans un parc public, je savais me contenir mais j'allais finir par perdre définitivement le contrôle au risque de choquer certaines âmes sensibles. Autant avouer ma défaite et lui annoncer clairement qu'elle avait gagné, que le calvaire qu'elle me faisait vivre était pire à cet instant que les tortures que j'avais pu subir. Mes lèvres se rapprochèrent des siennes mais je m'arrêtais avant, à quelques millimètres. Je pouvais sentir son souffle se mêler au mien. Je pouvais l'embrasser une nouvelle fois. Nous pouvions continuer ce jeu avec la glace. Je croisais son regard et le mien disait définitivement qu'il en voulait davantage.

« Viens.. »

Je lui murmurais ce mot en frôlant ses lèvres. Non je ne l'embrasserai pas une nouvelle fois, il n'était pas question que je sois le seul à être torturé. Au contraire, je m'écartais pour me relever. Je lui tendis une main, et attendis le regard confiant qu'elle la prenne. Elle avait le choix. Gagner encore du temps ou me suivre. Si je ne me trompais pas, elle choisirait la seconde option. Sinon elle ne m'aurait pas provoqué ainsi. Elle aurait mangé sa glace bien sagement, me laissant boire mon jus d'orange. Il ne fallut pas longtemps avant que sa paume vienne se poser contre la mienne. Je l'aidais à se remettre debout, et ne lui lâchant pas la main, je l'entraînais vers la sortie du parc. La glace, aussi bonne était-elle ne fut jamais finie. Elle atterrit dans une poubelle, ce qui aurait été sûrement un sacrilège à ses yeux si le contexte avait été tout autre.

Il fallut des minutes qui nous parurent longues et interminables pour rejoindre la petite maison que j'occupais non loin du parc. Après pour ce qui s'y passa....

Je me souviens que notre impatience prit le dessus et que nos vêtements volèrent.
Je me souviens de la violence de notre désir qui l'emporta sur le reste.
Je me souviens avoir recommencé à reprendre pied dans la réalité qu'en début de soirée.
Je me souviens d'un dîner préparé entre deux tests de goût, à la façon de la glace à la fraise.
Je me souviens que le restant de la soirée fut beaucoup plus tendre en caresses, prenant notre temps pour découvrir le corps de l'autre.
Je ne me souviens pas quand le sommeil eut raison de moi mais je me souviens qu'à mon réveil, elle était contre moi.

Je me souviens la première question que je me suis posé quand mon regard se posa sur sa silhouette endormie : jusqu'où cela allait-il nous mener avant que ça ne se termine ?

FIN
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Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars [Terminé]

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